Cameroun - Environnement. Audit : Comment le bois camerounais est volé

Claude Tadjon | Le Jour Jeudi le 27 Aout 2015 Société Imprimer Envoyer cet article à Nous suivre sur facebook Nous suivre sur twitter Revoir un Programme TV Grille des Programmes TV Où Vendre Où Danser Où Dormir au Cameroun
Le rapport commandé par l’Union européenne sur l’exploitation forestière fait état de graves fraudes et de corruption inacceptables.

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Le rapport d’audit commandé par l’Union européenne sur l’exploitation forestière au Cameroun dont copie des conclusions vient de fuiter dans la presse, alors même qu’il tarde à être publié, est un indicateur pertinent de la dégénérescence qui a fait son lit dans ce secteur névralgique de l’économie de notre pays. La fraude et la corruption y ont franchi depuis longtemps les limites de l’acceptable. L’Institut national de la statisque l’indique d’ailleurs de manière à peine voilée dans l’une de ses récentes publications, les comptes nationaux trimestriels 2015, premier trimestre.

En relevant que dans le sous-secteur de l’exploitation forestière, les activités ont paradoxalement enregistré une forte baisse (de 2,9 % à 0,8% entre le dernier trimestre 2014 et le premier trimestre 2015) malgré l’agrandissement de la superficie totale des forêts certifiées et exploitées. Pour faire simple, l’actvité décroit officiellement, dans un contexte où les superficies exploitées augmentent. Allez y comprendre quelque chose ! En fait, il n’y pas meilleur indicateur des pratiques frauduleuses qui caractérisent ce secteur d’activités définitivement réfractaire à la bonne gouvernance.

Un responsable de la Direction générale des impôts s’offusquait déjà du décalage entre le volume des activités réelles dans l’exploitation forestière et les prélèvements fiscaux ridicules qui en sont issus. Toujours selon ce responsable, le rapport d’audit commandé par l’Union européenne dévoilé en premier par le site Internet français Médiapart ne mettrait en lumière qu’une infime partie des réalités de ce monde du faux et de la fraude. Plus préoccupant, les entreprises à capitaux internationaux, dont la capacité logistique et financière de prélèvement du bois est presque infinie, dament le pion des pratiques illégales aux entreprises à capitaux camerounais qui, elles, se contentent généralement de strapontins. Est-ce pour cette raison que l’Union européenne freine des quatre fers, repoussant sans cesse à plus tard la publication d’un rapport d’audit accablant pour ces grandes firmes internationales ? D’ailleurs, se confiant à Mediapart, un responsable de la direction générale de l’Ue pour le développement et la coopération a déjà prévenu avec une dose de complaisance que les informations concernant les opérateurs détenteurs de titres sont considérées comme confidentielles et ne seront donc pas publiées.

On le voit, les exigences de confidentialité font ici clairement l’affaire des délinquants à col blanc, véritables pilleurs des forêts. Plus embarassant encore, le cas de l’Ue, dont le rapport met aussi en cause l’ action dans le domaine de l’exploitation forestière au Cameroun, notamment cette défaillance constatée dans la mise enoeuvre de l’Accord de partenariat volontaire (Apv) signé avec le Cameroun pour lutter contre le bois illégal. L’Ue a d’ailleurs fourni à l’Etat du Cameroun, à la société civile et au secteur privé d’importants moyens financiers pour cette lutte. Le constat d’échec est là, implaccable. Faudra-t-il encore dégager les responsabilités et prendre véritablement à bras le corps cette hydre de la corruption. L’administration camerounaise en charge des forêts dont le rôle est prépondérant dans la rationalisation et le contrôle de la conformité de l’exploitation forestière au Cameroun laisse, elle aussi, des plumes dans ce rapport qui dénonce des défaillances graves notamment dans l’archivage des documents pourtant émis par ce département ministériel.

On se retrouve dans une situation surréaliste où deux tiers des documents officiels ont été retrouvés chez les exploitants. Simple négligence ou oubli volontaire à des fins inavouées ? En tout cas, outre les risques environnementaux que cette exploitation forestière illégale de masse fait peser sur l’équilibre de notre écosystème, c’est encore une fois la culture ambiante de l’impunité qui risque d’être le principal allié de tous ceux qui évoluent en marge de la loi forestière. Tous fraudeurs !
 

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