Affaire Marafa. CONDAMNATION DE MARAFA HAMIDOU YAYA ET YVES MICHEL FOTSO: ENTRE JUBILATION INDECENTE PAR CI, ET SENTIMENT DE DEGOUT PAR LA...

Le Front Hebdo | Camille Nel Lundi le 01 Octobre 2012 Société Imprimer Envoyer cet article à Nous suivre sur facebook Nous suivre sur twitter Revoir un Programme TV Grille des Programmes TV Où Vendre Où Danser Où Dormir au Cameroun
Les inévitables questions que suscitent indubitablement les condamnations de Marafa Hamidou Yaya et Yves Michel Fotso

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« Alea facto est » : La condamnation à de lourdes peines privatives de liberté annoncée de façon subliminale par l’acte d’accusation depuis l’ouverture des débats et dont le public n’attendait que la confirmation devant la barre vient enfin d’être consommée : pour le compte de la sulfureuse affaire « BBJ2 », Marafa Hamidou Yaya et Yves Michel Fotso ont eu droit à 25 années de réclusion criminelle, avec en prime 22 milliards de Fcfa à payer à l’Etat du Cameroun.

Un verdict sec comme un coup de pistolet. C’est donc tout logiquement que le Cameroun profond se trouve partagé entre l’émoi des uns et les sarcasmes des autres depuis que cette décision a été rendue par le TGI du Mfoundi le 22 septembre dernier à 07h 12 minutes.

Certains camerounais n’ont pas hésité d’applaudir à s’en écorcher les paumes des mains avec un rire jaune. D’autres en ont attrapé la nausée. Mais en marge, les observateurs froids surtout ceux qui ont suivi les débats de bout en bout n’ont pas pu résister à la tentation de se poser des questions sur l’état d’esprit des magistrats ayant rendu cette décision : ont-ils eu besoin de courage ? Sont-ils heureux ? Ont-ils le sentiment du devoir accompli ou des consignes appliquées ?

C’est dire à quel point les lourdes sanctions que viennent d’infliger les juges Schlick, Elong et Noah aux accusés de l’affaire des 29 millions de dollars de l’achat de l’avion présidentiel, suscitent des questions. De lourdes questions. De graves questions. De brûlantes questions. Des questions qui donnent des frissons. Nous connaissons le principe : il est interdit de commenter une décision de justice dès lors qu’elle est rendue. Que ces juges l’aient rendue en leurs âmes et conscience ou sous la pression de «hautes instructions», il est interdit à quiconque, et surtout aux journalistes de commenter une décision rendue par une juridiction.

Nous n’oserons ainsi, pour rien au monde, déroger à cette sacro-sainte prescription. Encore que le mauvais vent qui souffle à l’heure qu’il est, et qui est chargé de lourdes menaces pour les journalistes qui s’entêteraient à lire entre les lignes des actes des magistrats, nous incite froidement à faire preuve de circonspection. S’il est interdit de commenter la décision que vient de rendre la collégialité conduite par le juge Schlick, latitude a en tout cas été largement donnée à une certaine presse de jubiler de manière indécente à la suite de ce verdict. Dans le strict respect de la déontologie, notre journal s’est toujours astreint de jouer pleinement son rôle : informer, éduquer, éclairer.

Depuis plusieurs mois, nous avons accompli ce postulat dans la seule optique d’amener le grand public à comprendre les paramètres de cette affaire que chacun, dans notre pays, cuit à sa sauce personnelle. Et aujourd’hui que la première étape de ce procès qui fera forcément date dans l’histoire de notre pays vient d’êre franchie, il importe que la presse loin de toute tentation cancanière, réductrice ou mutilatrice aide ceux qui n’ont rien compris à mieux cerner ce dossier, ou plus simplement éclaire ceux qui ne se contentent obstinément que des ragots ou des «on dit».

Dans les colonnes des journaux qui, dès le lundi 24 septembre ont inondé les kiosques, le grand public a pu avoir une idée approximative de l’ambiance qui a prévalu dans et autour du palais de justice de Yaoundé trois jours plus tôt. Les uns et les autres ont eu la primeur du sentiment des avocats tant des accusés que de la partie civile et même des protagonistes. Marafa Hamidou Yaya a déclaré qu’il «est déçu mais non vaincu». Yves Michel Fotso, se refusant tout autant d’émettre le moindre commentaire a affirmé qu’il « portera sa croix ».

Mais à l’analyse de la substance même des peines, il est impossible de ne pas se poser des questions : Marafa Hamidou Yaya, Yves Michel Fotso, Assene Nkou et Jean Louis Chapuis ont écopé de 25 années d’emprisonnement ferme. Mme Marie Gisèle Sandjong absente des débats a eu 15 ans, et Mme Julienne Kounda 10 ans de réclusion. Pour un détournement que l’on a affirmé avoir été réalisé « ensemble et de concert », la tentation serait grande de se demander pourquoi ces peines à étages alors que, au regard des débats, les six inculpés étaient logés à la même enseigne.

Deuxième grande question que n’a pas pu s’empêcher de nous poser l’un de nos plus fidèles lecteurs : Marafa Hamidou Yaya aurait profité de quel montant exactement? Et plus précisément, il aurait détourné et obtenu combien de francs Cfa ? Nous ne pourrons que lui dire que le président Schlick, dans sa longue, très longue synthèse, a dit et très rapidement : « peu importe que ce crime n’ait pas profité à tous les auteurs, Marafa n’a pas rapporté la preuve au-delà de tout doute raisonnable qu’il n’était pas au courant des actes de Yves Michel Fotso. »

C’est ce que Me Patrice Monthé avocat de l’ex SGPR a qualifié de «crime d’amitié». Un crime d’amitié, à en croire l’accusation qui date de 1993 !

Nous avons reçu par contre l’indignation d’un autre de nos lecteurs résidant en Suisse qui nous a rappelé que l’Etat du Cameroun avait initié une procédure en Suisse dans l’optique de récupérer les mêmes 29 millions de dollars, mais qu’il avait été débouté par la justice Suisse au motif que le Cameroun avait déjà obtenu réparation devant la justice Américaine dans l’Etat de l’Oregon. Ce qui, à en croire notre lecteur installé à Genève, aurait fait du « dossier BBJET 2 », une procédure illégale.

Me Alice Nkom met de l’eau à cette révélation en page 2 du journal «Le Jour» du lundi 24 septembre dernier qui dit, par rapport au «settlement agreement» signé par le représentant de l’Etat du Cameroun aux Etats-Unis, document à travers lequel le Cameroun s’était engagé à ne plus poursuivre personne relativement aux 29 millions de dollars, et surtout, document à cause duquel le Cameroun avait été débouté en Suisse : « Le code civil attache aux convention librement signées entre les parties, l’autorité de la chose jugée, comme tout jugement définitif rendu en dernier ressort.

Un pays qui se respecte, respecte sa propre signature, sa parole et ses engagements, ne doit, ni ne peut embastiller ou condamner ses ressortissants après avoir signé un tel document. Quel que soit le lieu où la transaction et sa signature sont intervenues ». A en croire Me Alice Nkom, c’est à cet égard que la procédure du BBJ2 n’aurait été rien d’autre qu’une « procédure interdite ».




Dernière question que l’un de nos abonnés nous pose au téléphone depuis qu’il a pris connaissance du verdict : les 21 milliards de dommages et intérêts à payer solidairement par les condamnés correspondent à quoi ? Nous pensons que c’est une question qu’il devait poser au juge Schlick, car, l’autre spécificité de ce jugement est que les biens des condamnés ne seront pas saisis. Traduction : s’ils veulent, ils pourront vendre leurs biens et payer les dommages et intérêts. S’ils n’y tiennent pas, ils pourront toujours conserver leurs biens et ne pas payer. Mais 21 milliards, 375 millions assortis de 1,5 milliards de Fcfa pour les dépens à payer, c’est tout de même une ardoise salée adressée à des personnes qui ont 25 années à purger au mitard.

Relevons que la liquidation de l’ex-Camair qui avait été déboutée avait, pour sa part, demandé avant les requisitions du parquet, le paiement de 45 milliards de dollars à payer par les six condamnés à l’Etat du Cameroun. En définitive, faut-il continuer à se poser des questions à propos de ce dossier qui a été tranché, et qui n’a plus pour seul recours que la Cour Suprême ?

Nous pensons que rien ne devrait empêcher qu’on s’en pose sans arrêt, car une chose est sûre : un jour, dans cinq, dix ou vingt cinq ans, on reparlera de ce procès, de ces condamnations, et de tout ce qui, pour l’heure, empêche tout commentaire. Et ce jour-là, il est certain que beaucoup de langues se délieront.

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