Cameroun - Nigeria. Nigeria/Massacre: » Beaucoup de Camerounais seraient dans les rangs de Boko Haram »

Le septentrion Mercredi le 31 Octobre 2012 Société Imprimer Envoyer cet article à Nous suivre sur facebook Nous suivre sur twitter Revoir un Programme TV Grille des Programmes TV Où Vendre Où Danser Où Dormir au Cameroun
Après le massacre le 05 octobre dernier d’une quarantaine d´étudiants au centre universitaire de Mubi, ville-carrefour et commerciale située dans le nord-est du Nigeria, près de la frontière du Cameroun , les forces de sécurité n’ont pas encore présenté leur version des faits mais continuent les arrestations. Cependant,un enseignant de cette l’université d’État de l’Adamawa de Mubi livre sous anonymat un témoignage poignant.

ADS



Le 2 octobre 2012, nous avons appris par voie de presse qu’une tuerie a fait une quarantaine de morts à l’école polytechnique fédérale de Mubi. Qu’en est-il exactement ?

Oui! Dans la nuit du 1er au 2 octobre 2012, aux environs de 21 h 12 mn, les habitants d’un quartier de Mubi (Wuro Patuji) ont été plongés dans une torpeur inexplicable en entendant des coups de feu. À cause du couvre-feu qui sévissait dans la ville à partir de 18 h, les gens croyaient d’abord à une intervention des forces de l’ordre. Mais quelques minutes après les gens ont compris que c’était différent. Le lendemain aux premières heures de la matinée, les policiers sont venus dans notre camp, (je réside dans un camp appartenant à l’université où le personnel enseignant et non enseignant est logé, juste à la sortie dudit quartier).

Selon nos informations, les forces de l’ordre ne savaient rien de ce qui s’était passé la nuit précédente. Quelqu’un se serait rendu à la police et aurait décrit un endroit où il aurait vu des corps sans vie. Comme c’était très proche de notre camp, la police croyait que c’était chez nous. Les tueries n’ont pas eu lieu à l’école polytechnique comme on aurait bien dit sur les antennes de beaucoup de médias, mais à Wuro Patuji avec la différence que ça avait fait beaucoup de victimes parmi les élèves de Ct collège.

On avait annoncé 42 sur certaines radios, mais je doute de ce nombre. Selon des sources hospitalières, 28 corps ont été déposés à la morgue. Mais on estime le bilan entre 34 et 36 morts. La plupart étaient des élèves de l’école fédérale polytechnique de Mubi, avec 3 étudiants de l’école des infirmiers et d’autres habitants du quartier. Il y avait aussi des victimes de confession musulmane, donc les proches n’ont évidemment pas déclaré les morts, ce qui faisait à ce que nous avons estimé les victimes à 34-36.

Vous semblez soutenir que les médias en font un peu trop. Pensez-vous qu’il y ait un intérêt particulier à exagérer avec cette tuerie ?

Je ne crois pas que les médias ont un intérêt particulier à exagérer les tueries. Mais il faut noter qu’aucun correspondant de ces médias n’était à Mubi quand les faits se sont produits. Ils passaient des coups de fil chacun donnant ses avis selon ses sentiments. Ici au Nigeria, les chrétiens se sont plaints plusieurs fois du comportement de certains médias tel que Bbc Haoussa qui exagère leur reportage. On leur reproche d’être favorables aux musulmans en manipulant les informations.

Je soutiens toujours mon point de vue que les médias exagèrent parce qu’on disait que les tueries ont eu lieu à l’université, après d’autres comme Rfi disait que les tueries ont eu lieu à l’école polytechnique qui est un institut de l’université. L’école polytechnique est fédérale alors que l’université de Mubi appartient au gouvernement local. L’université donne un enseignement universitaire alors que l’école polytechnique est un collège, pas au niveau universitaire. Donc les deux institutions n’ont rien en commun. J’insiste sur la véracité de l’information et non sur le bruit qui est souvent donné pour plaire à qui je ne sais.

Certaines sources soupçonnent Boko Haram d’être derrière la tuerie. D’autres soutiennent qu’il s’agit d’un conflit interethnique entre étudiants. Quelles peuvent être à votre avis les raisons de ce soulèvement meurtrier ?

Je suis catégorique. Compte tenu de ce qu’on avait vu et entendu, il n’y avait pas de doute. C’est Boko Haram. D’abord, si c’était un conflit interethnique, dites-moi quelles sont les ethnies impliquées. Les décédées n’appartenaient pas à une seule ethnie. Les Boko Haram, tuent et les chrétiens et les musulmans qui ne soutiennent pas leur opinion. Ce n’était pas un soulèvement meurtrier, ces tueries étaient bien planifiées. Si c’était une affaire d’étudiants, qu’avaient-ils à faire bruler les églises.

Au cours de cette nuit, on avait mis le feu à une église “The redeem Church” de Wuro Patuji. On avait tenté de mettre le feu à l’église catholique du quartier, “Holy Trinity”, mais seulement le gardien avait refusé d’ouvrir le portail quand ceux-là avaient frappé à la porte. Les tueries avaient juste coïncidé avec les élections de la coopérative du collège et on faisait croire que ce sont les perdants qui avaient organisé. Ce n’était pas la première fois qu’on organisait les élections dans cet établissement.

Aux dernières nouvelles, l’armée ratisse large pour dénicher les suspects. Quelle est l’ambiance qui prévaut à Mubi depuis la tuerie ?

Le ratissage de l’armée avait commencé depuis. On avait déjà fouillé les maisons des suspects et de larges quantités d’armes et de munitions avaient été saisies. Les services des renseignements fournissent la liste des suspects. Ceux qu’on arrête dénoncent à leur tour d’autres. L’armée est présente à Mubi depuis un certain temps et les arrestations continuent tous les jours. La situation à Mubi est toujours tendue. Tous les mouvements sont toujours contrôlés. Le couvre-feu est toujours en vigueur tous les jours de 18 h le soir à 6 h du matin.

Est-ce vrai que de nombreux Camerounais fuient la ville de Mubi en ce moment ?

Je ne peux pas le confirmer, d’autant plus que je suis là. Mais je ne crois pas que les Camerounais sont pourchassés parce qu’ils sont Camerounais. Ce que je connais c’est que beaucoup de Camerounais, surtout de confession musulmane se sont assimilés, et beaucoup seraient dans les rangs de Boko Haram. S’ils sont pourchassés, c’est en tant que membres de cette secte.






Devant le chez-moi, il y a un contrôle mixte; armée et police. Quand un véhicule arrive, on fait descendre tout le monde et on fouille les personnes et l’intérieur des véhicules. Si tu es Camerounais avec une carte d’identité on te respecte et dans d’autres contrôles, on ne te fouille pas. Généralement beaucoup de gens ont fui la ville, inclus les autochtones, pour leur propre sécurité.

En tant qu’habitant de Mubi et enseignant, avez-vous un message à faire passer particulièrement à vos étudiants et aux Camerounais de cette ville ?

Le message que je donne et que je donnerai à tous les étudiants camerounais et aux autres Camerounais au Nigeria c’est d’être prudent. Les Nigérians sont en général intolérants en matière de religion, quelle que soit leur confession. Je dis aux Camerounais que chacun pratique sa religion dans le respect des autres.

Aux musulmans, je leur dis de ne pas rejoindre les sectes islamiques, qu’ils continuent à pratiquer leur religion comme ils le faisaient au pays. Pour les chrétiens c’est beaucoup plus compliqué, surtout si tu leur fais certaines remarques concernant leur nouveau choix religieux. Ils ne vous rendent plus visite et n’apparaissent que dans de situations critiques, juste pour de l’aide.

Mais en général, que tu sois Camerounais, Nigérians ou autres, si tu n’as rien à te reprocher, il n’y a aucune raison de fuir, peut-être que l’atmosphère devient parfois insupportable et chacun voudrait laisser la ville pour quelque temps.

 Le septentrion/camer.be : Agnès Tailé/ Rigobert Yangkréo
 

ADS

 

ADS

ADS

Les plus récents

Rechercher un article

ADS

ADS