Cameroun - Agriculture. PAUPÉRISATION: Vol d'hévéa à ciel ouvert - Les Indonésiens font main basse sur l'hévéa camerounais

Nadine Bella | La Météo Jeudi le 22 Novembre 2012 Société Imprimer Envoyer cet article à Nous suivre sur facebook Nous suivre sur twitter Revoir un Programme TV Grille des Programmes TV Où Vendre Où Danser Où Dormir au Cameroun
Contrats léonins, vente parallèle de latex, mauvais traitement des ouvriers... autant de ruses utilisées par les repreneurs de Hévéa-Cameroun (Hevecam).

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Le mois de janvier n'aura pas été de tout repos à Hevecam. Les ouvriers de cette agro-industrie ont observé près d'un mois d'arrêt de travail.

Mercredi 18 janvier, des milliers d'employés ont envahi le village 7 de Niete, où se situe l'usine de la société productrice de l'hévéa au Cameroun. Très en colère, ils ont chassé de force les 600 ouvriers qui se trouvaient derrière les machines. Ce qui leur a permis de fermer l'usine.

La société Hevecam estimait alors ses pertes à près de 80 millions FCFA en moyenne par pur. Entre autres griefs soulevés par les grévistes, la détérioration des conditions d'hygiène et de travail ; l'indemnité de 3% issue de la privatisation de l'ex-Hévécam en 1996 et la revalorisation des salaires. Les ouvriers ne sont pas les seuls à se plaindre des Indonésiens, repreneurs d'Hevecam. Dans le cadre de la privatisation de la société Hevecam, l'Etat du Cameroun et les repreneurs ont convenu de la poursuite de la promotion de l'hévéaculture villageoise dans la zone d'implantation de l'agro-industrie. C'est ainsi qu'au terme de l'avis d'appel à candidature N°0540/AC/MINADER / CSGPHN/2010 pour l'acquisition des parcelles d'hévéa dans la concession de Niete à Ngok du 17 mai 2010, des parcelles de plantation ont été attribuées à des personnes physiques ou morales de nationalité camerounaise. L'attribution des dites parcelles dont la superficie oscille autour de 5 hectares chacune, est dûment matérialisée par des cahiers de charges signés entre l'Etat, les acquéreurs et Hevecam. Les clauses des dits cahiers de charges font loi des parties.


Contrats.

Selon les informations parvenues à La Météo, plusieurs clauses des cahiers de charges ne sont pas respectées. Un acquéreur approché confie : «L'article 5 prévoit qu'il faut tenir une comptabilité mensuelle, trimestrielle et annuelle faisant ressortir la situation globale des plantations de Ngock et la situation individuelle de l'acquéreur. Chaque trimestre, des états financiers retraçant les opérations de la période et signés par les trois parties seront produits en trois exemplaires». Il poursuit : «Hevecam doit communiquer à l'acquéreur chaque mois le détail du calcul établissant le prix d'achat de sa production... Reverser à l'acquéreur dès la deuxième année d'exploitation, une quotte part du bénéfice annuel dans les conditions à convenir d'accord parties». Et de conclure : «Je n'ai jamais vu, ni signé un document comptable. Je ne sais pas ce que produit ma plantation chaque mois. La direction d'Hévécam et le comité de suivi de la gestion des plantations d'hévéa de Ngok gèrent l'affaire en solo et ne communique rien à personne. Pire, contrairement aux Causes du cahier de charges, ils ont décidé de nous payer semestriellement. Avec des montants dérisoires, sans justificatifs».

L'autre point d'achoppement, c'est l'argent rétribué aux acquéreurs. Ces derniers auraient reçu 700.000 FCFA en août 2011, 1.600.000 FCFA en mars 2012, 340.000 FCFA en août 2012, apprend-on. Selon des explications qui ont été fournies à notre rédaction, cet argent représente le quart de la production, le reste étant retenu à la base par Hevecam pour le retour sur investissement. Seulement, les acquéreurs ne sont pas satisfaits de cette distribution. Une élite de Nieté ayant bénéficié d'une parcelle de 5,35ha, reconnait à cet effet: "Ceux de nos frères qui ont des plantations villageoises d'un ha perçoivent au moins 500.000 FCFA chaque mois. Imaginez ce que nous pouvons avoir au bout d'un semestre avec des plants sélectionnés pour 5 ha. Hévécam et le Comité de gestion disent qu'ils ne considèrent que les fonds de tasse dans notre cas. Où va donc le latex?".


PAUPÉRISATION: Vol d'hévéa à ciel ouvert

«Au mois de septembre, le 2e adjoint au maire de Niete, assis devant sa boutique sise au carrefour Akom I, a vu deux camions 10 roues chargés d'hévéa, passer devant sa maison», confie une source bien introduite à la direction générale d'Hévécam.

«Au mois de septembre, le 2e adjoint au maire de Niete, assis devant sa boutique sise au carrefour Akom I, a vu deux camions 10 roues chargés d'hévéa, passer devant sa maison», confie une source bien introduite à la direction générale d'Hévécam. Il poursuit : «Lorsqu'un troisième camion est passé, l'adjoint au maire est devenu très inquiet, parce que ces gros porteurs étaient de couleur verte alors que ceux d'Hevecam sont jaunes». Notre informateur indique que le conseiller municipal, accompagné d'un certain planteur dénommé Nko'o, aurait tout mis en œuvre pour empêcher le 3e camion d'atteindre Kribi. Pour ce faire, il aurait demandé au chef de barrière de pluies de Nko'olong de bloquer le passage. Le chauffeur de camion aurait, de ce fait, été pris à partie par les populations de Nko'olong. Sous les menaces, il avouera que ce caoutchouc appartient au «Patron». De quel patron s'agit-il? II n'en dira pas plus.

Le chef de barrière aurait fait appel au commandant de brigade de Nieté, afin de décanter la situation, apprend-on. Ce dernier indiquera qu'il est nécessaire pour lui de ramener le camion à Niete, afin de saisir le préfet et le procureur de la République. Mais curieusement, le lendemain matin vers 10h, ledit véhicule rejoindra tranquillement Kribi. Selon des indiscrétions, le deuxième adjoint au maire aurait reconnu devant certaines personnes qu'il aurait reçu 50.000 FCFA et un appel téléphonique de Yaoundé, lui demandant de rejoindre la capitale pour besoin d'enquêtes. Nos multiples tentatives d'en savoir plus sur la suite de cette affaire restent vaines.

Seulement, cette histoire est venue remettre au gout du jour le vol d'hévéa devenu récurent dans les plantations d'Hevecam. Dans un premier temps, les populations riveraines étaient accusées de spolier la production de l'agroindustriel. Une véritable chasse à l'homme s'en est suivie contre les jeunes des village Zingui, Adjap, Akom I... A plusieurs reprises, les gardiens de la plantation ont surpris de jeunes gens transportant des sacs d'hévéa. Mais c'était sans savoir que le gros du vol était opéré par d'autres personnes. «Car, il faut se l'avouer, un camion 10 roues plein d'hévéa, ne peut pas circuler dans les routes d'Hevecam, traverser les barrières, sans l'accord des cadres de la société», souligne un ouvrier de l'entreprise ayant requis l'anonymat. Et de chuter «Un, deux, trois, camions, ça veut tout simplement dire que ces camions appartiennent à quelqu'un de très haut placé. Et on peut conclure que ce sont les grands d'Hevecam eux-mêmes qui organisent et entretiennent le vol d'hévéa». Et chose curieuse, le vol s'opère essentiellement depuis quelques temps, dans les plantations qui ont été rétrocédées aux nationaux. Et même, malgré le non respect des cahiers de charge, le président du comité de suivi de la gestion des plantations d'hévéa de Ngok aurait été fait administrateur d'Hevecam Y a-t-il complicité entre les deux structures pour mieux piller l'hévéa? 

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