Cameroun - France. Cameroun-France, Biya-Hollande: déjà la rupture?

Darline Datchoua | La Nouvelle Lundi le 03 Décembre 2012 Société Imprimer Envoyer cet article à Nous suivre sur facebook Nous suivre sur twitter Revoir un Programme TV Grille des Programmes TV Où Vendre Où Danser Où Dormir au Cameroun
A peine élu, François Hollande aurait-il déjà mis Paul Biya au ban des accusés? La rupture serait-elle déjà consommée entre ces 2 hommes d'Etat? Toutes ces questions et bien d'autres n'ont pas arrêté d'alimenter les commentaires sous les chaumières. Surtout du côté de ceux qui croient que le président français n'avait pas du tout été tendre à l'égard de son homologue camerounais au cours de leur tête-à-tête en marge du 14ème sommet des chefs d'Etat de l'Organisation internationale de la francophonie (Off) qui s'est tenu du 12 au 14 octobre 2012 à Kinshasa.

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Selon des sources introduites, en recevant son homologue camerounais le 13 octobre 2012 au Palais du peuple de Kinshasa en marge du 14ème sommet de la Francophonie, François Hollande serait allé au-delà d'un échange formel sur l'état des relations entre le Cameroun et la France au cours de leur entretien. Nos sources indiquent en effet qu'en plus de l'affaire de Thierry Michel Atangana, franco-camerounais incarcéré pour détournements de fonds publics, ce tête-à-tête, venant le même jour après celui du Comorien Ikililou Dhoinine, de celui du Congolais Denis Sassou Nguesso et de celui du Béninois Boni Yayi, aura servi de cadre aux 2 dirigeants camerounais et français pour évoquer de nombreux sujets sensibles, parmi lesquels les problèmes de démocratie, de bonne gouvernance, de corruption et de succession à la tête de notre pays. Pour ceux qui en doutaient encore, ce problème politiquement complexe et sensible aurait donc bel et bien été l'un des sujets- phares abordés à cette occasion par Paul Biya et François Hollande. Selon les mêmes sources, le président français aurait indiqué que notre pays serait une véritable bombe à retardement tant que les principaux mécanismes de succession à la tête du pays ne seraient pas clairement définis pour favoriser une transition en douceur. Pour ne rien arranger, nos sources précisent à cet effet que le fait d'avoir manqué de mettre en place certains organes prévus par la Constitution, à l'instar de la Cour constitutionnelle et du Senat, constitue un vrai handicap dans le sens d'une transition en douceur en cas d'empêchement définitif ou de vacance à la tête de l'Etat. Dans les sphères dirigeantes où nous avons mené nos investigations, le sujet de la succession à la tête de l'Etat continue pourtant de déranger. Comble de paradoxe, personne ne veut se prononcer publiquement sur ce qui empêche cependant la mise en place de la Cour constitutionnelle et du Senat.

Seulement, partagés entre inquiétude et doute, de nombreux observateurs ne manquent pas de ce fait de relever. Cette mauvaise foi politique qui empêche ostensiblement de mettre en place le Senat, le corps électoral concernant les sénatoriales étant d'avance connu. Pour eux, ils ne comprennent pas pourquoi Paul Biya prend toujours soin de garder étrangement le silence sur ses intentions concernant la mise en place de la Cour constitutionnelle et du Senat.

Tout comme paraissent étranges pour eux les inexplicables tergiversations du président national du Rdpc à s'offrir un vice-président délégué qui pourrait conduire le parti en cas d'empêchement définitif du président national. parlant des reformes institutionnelles en cours au Cameroun; ces observateurs apprécient les avancées qui sont faites depuis quelques temps par l'adoption de certaines lois à l'Assemblée nationale pour marquer le progrès de ce processus constitutionnel de succession à la tête du pays et surtout l'imminente de la mise en place du Senat.

Toutefois, ils affichent beaucoup d'appréhension à voir le Senat conduire, sans couac ni heurts, la transition en l'état actuel des choses. D'où l'hypothèse de la création d’un poste de vice-président délégué à la tête du parti au pouvoir. Pour eux, cela aurait le double avantage de donner des indications claires par rapport au candidat du Rdpc en cas d'empêchement définitif du président national dans une élection présidentielle anticipée, organisée selon la Constitution, par le président du Senat. Et de taire les velléités pouvoiristes des uns et des autres, nombreuses au sein du parti au pouvoir dans le clair-obscur actuel. Nos sources concluent que ce sont toutes ces préoccupations, et bien d'autres, qui constituent tous les ingrédients de cette véritable bombe à retardement dont aurait parlé François Hollande. Il l'aurait donc prévenu à Paul Biya.






«Nouvelle donne»

Est-ce donc cela qui explique qu'il n'ait pas jusque-là reçu son homologue camerounais à l'Elysée, comme le prétendent les mêmes observateurs? Une question qui en appelle inéluctablement une autre: défendre des valeurs de démocratie interdit-il d'avoir des intérêts dans un pays? Pour répondre à ces 2 questions, il convient d'abord de souligner à titre de rappel que le président français ne s'est tourné vers le continent africain que 2 mois après son élection, à la tête de la République française en recevant à l'Elysée le Guinéen Alpha Condé (le 2 juillet), le Gabonais Ali Bongo Ondimba (le 5 juillet) et le Sénégalais Macky Sall (le 6 juillet). Ceci après s'être entretenu au téléphone avec le Tchadien Idriss Deby Itno (le 5 juillet) et le Burkinabe Blaise Compare (le 6 juillet). A préciser. Lors de ces différents entretiens, François Hollande vouvoie curieusement ses interlocuteurs. Sauf le Nigérien Mahamadou Issoufou, qu'il fréquentait dans les réunions de l'Internationaliste socialiste. Celui-ci étant le seul qu'il tutoie. En somme, ces différents contacts avec les chefs d'Etat africains dévoilent un François Hollande en nette rupture avec le style de la tape sur l'épaule de son prédécesseur. Rien d'étonnant pour un président français qui, du continent africain, ne tonnait guère que le Maghreb (particulièrement l'Algérie) et la Somalie visitée autrefois dans le cadre d'un stage de futur énarque à l'époque de Siad Barré. Conséquence: quand il décide d'aborder sa politique africaine, rien ne lui lie les mains, ni l'héritage des réseaux, ni ces fils à la patte que sont les cadeaux financièrement lourds des palais dorés africains, encore moins les amitiés encombrantes.

En outre, pour trouver d'autres réponses à nos précédentes questions, il ne faut pas oublier que c'est cette virginité d'un président français normal, sans condescendance ni familiarité, sans tutoiement automatique ni tapes dans le dos, qui lui accorde toute la lucidité actuelle qui assure, comme on va le constater, l'armature de son discours politique. La preuve? Cet extrait d'un de ses récents discours. «Notre vision de l'Afrique doit refléter ce qu'elle est aujourd'hui:.un continent en forte croissance qui le sait et ne supporte plus le discours larmoyant à son endroit. Un continent où la démocratie progresse, où l'environnement et l'énergie sont des sujets majeurs, et avec lequel nous avons une proximité historique, culturelle, linguistique exceptionnelle». Comme nous pouvons donc le constater, pour François Hollande, il s'agit d'établir une «nouvelle donne» fondée sur la transparence des relations économiques, la vigilance dans l'application des règles démocratiques et le respect de la souveraineté. En d'autres termes, pour le président français, il faut à tout prix éviter les transitions douloureuses à la tête des Etats africains. Au sortir de sa rencontre avec François Hollande à Kinshasa, Paul Biya semble avoir décrypté ce message plus ou moins subliminal de son homologue français. Les actes valant mieux que les paroles, l'on comprend l'intérêt des reformes actuellement en débats à l'Assemblée nationale, afin non seulement d'harmoniser certaines lois, mais de procéder dans les tout prochains jours à une mise en place sure et définitive des organes prévus par la Constitution. Sur un autre plan strictement interne, il y a quelques mois, la question de la création d'un poste de vice-président délégué à la tête du Rdpc avait déjà été longuement évoquée dans le huis-clos de certaines réunions restreintes en hauts lieux. Il n'est donc pas exclu qu'elle revienne en débats, afin de nous éviter ce qu'a connu il y a quelques années la Côte-d'Ivoire après la mort de Félix Houphouët Boigny. Et qu'avait risqué, il n'y a pas longtemps, de connaitre le Gabon après la mort d'Omar Bongo Ondimba. De quoi se mettre à dessiner les contours d'une convergence de vues, voire d'un attelage objectif entre la France et le Cameroun face à la percée des investisseurs chinois en Afrique centrale, après la prochaine visite du président Paul Biya à l'Elysée confidentiellement prévue entre les mois de décembre 2012 et de janvier 2013.

 

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