Elecam. Elecam et le Parti-Etat: la Fraude électorale sera biométrique

Le Messager Lundi le 18 Février 2013 Société Imprimer Envoyer cet article à Nous suivre sur facebook Nous suivre sur twitter Revoir un Programme TV Grille des Programmes TV Où Vendre Où Danser Où Dormir au Cameroun
Comme son nom l’indique, une carte nationale d’identité a pour vocation d’identifier une personne et de la particulariser parmi bien d’autres au sein d’une nation. Cette pièce comporte donc des détails, des indications et des signes si particuliers, si précis et si spécifiques qu’il ne devrait pas être possible de prendre Untel pour Tel Autre. Les diverses empreintes qu’on y fait parfois apposer visent le même objectif : veiller à ce que personne ne soit pris pour un autre, et que personne ne puisse, par imposture, se substituer à un autre pour poser un acte civil ou commettre un forfait.

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Avec les nouvelles technologies en matière de documentation et d’archivage, les références de toutes les cartes nationales d’identité des Camerounais devraient être centralisées dans un fichier national, accessibles à tout moment par les services compétents de contrôle et d’investigation. Il devrait suffire d’un clic de souris ou d’une frappe sur un clavier pour qu’apparaisse sur un écran d’ordinateur l’individu dont les références sont « entrées » en machine.

Ayons le courage de reconnaître que le Cameroun est encore bien éloigné de ce rêve d’organisation, de précision ou de célérité. La plupart des enquêtes se font encore au faciès, par une approche physique qui exige de pénibles déplacements et des contacts parfois si compromettants qu’ils exposent les enquêteurs à toutes sortes de négociations et de pratiques qui laissent resurgir bien des faiblesses qu’on voulait étouffer.

Le fait qu’au Cameroun nous ne disposions ni d’un fichier national crédible, ni d’une mémoire nationale fiable de l’identité est une défaillance d’Etat lourde de conséquences. La première de ces conséquences est qu’au moment où vous lisez ces lignes, chaque Camerounais peut disposer de plusieurs cartes nationales d’identité ! Il suffit en effet de déclarer que vous avez perdu l’ancienne pour vous en faire établir une autre. La nouvelle qui vous sera établie portera toujours, et encore votre photo ; mais seule votre photo y sera reconduite ; car c’est un tout autre numéro de carte qui vous sera affecté. Notre système de documentation et d’archivage ne permet donc pas une reproduction à l’identique de votre identité. C’est le boulevard pour la démultiplication des cartes et la falsification de l’identité. Il n’y avait déjà aucune certitude que la carte déclarée perdue le soit effectivement. Il est même possible que vous l’ayez temporairement égarée. Si d’aventure vous la retrouviez, vous pourriez ainsi vous retrouver avec deux cartes nationales d’identité, avec la même photo, mais avec des références totalement différentes.

Avec la gratuité électoraliste de la carte nationale d’identité, rien n’empêche Untel de se faire établir plusieurs cartes d’identités à plusieurs endroits, avec la même photo mais sous des noms et des numéros différents. Cela veut dire qu’une même personne a désormais la possibilité de se faire inscrire à plusieurs endroits, et de se faire enregistrer dans plusieurs bureaux de vote. Le moment venu, cet individu en plusieurs sera plusieurs électeurs en un dans les différents lieux de vote où il s’est enregistré avec ses multiples cartes d’identité.

La fraude électorale massive est donc rendue possible parce que la carte d’identité dite« nationale » n’a plus rien de national. En effet, il ne suffit pas qu’un carton soit frappé du drapeau du Cameroun pour que les informations qui y figurent soient de portée ou d’importance nationale. Il faut encore, il faut surtout qu’au niveau national, chacun puisse en vérifier l’authenticité et la crédibilité. En dehors de cette crédibilité nationale, nous aurons des cartes d’identification frauduleuses sans valeur civique ni éthique.

Les élections en préparation au Cameroun semblent donc faussées d’entrée de jeu, parce qu’au Cameroun, la carte d’identité n’est pas biométrique. La fantaisie qui l’entoure impacte négativement et frauduleusement les inscriptions qu’on a voulues, elles, biométriques. Les inscriptions dites biométriques ne s’étant pas adossées sur des identifications biométriques, la fraude électorale savamment conçue ne se commettra plus ‘’pendant’’ les élections. Cette fois, ils n’ont pas attendu le vote : la fraude massive s’organise dès ces inscriptions ‘’biométriques’’ dont la pièce clé, la carte d’identité, est souterrainement livrée à des manipulations et à des duplications exponentielles. Tant que l’établissement des cartes nationales d’identité ne sera pas biométrique, il sera illusoire d’envisager des inscriptions biométriques efficaces. Des inscriptions ainsi faussées déboucheront inéluctablement sur des résultats électoraux faussés.

Au sein du parti-Etat, ils le savent ; ils ont eu la clé du code de fraude électorale et ils ne se privent déjà plus. C’est ainsi que le 03 février 2013, l’on a surpris un charter de mercenaires électoraux dans la banlieue d’Eséka. Un car Coaster de 70 places a été charrié chez un chef de village, où l’un des bureaux de vote est installé. Par complicité passive, des Agents d’Elecam se sont activés à inscrire des individus totalement inconnus dans cette circonscription électorale, personne ne les ayant jamais vus dans ce bled. Et le car Coaster les a immédiatement ramenés une fois la besogne terminée. Interpellé par ses populations, le chef de ce village a tenté de se dédouaner à peu de frais : « Je ne sais pas ce qu’ils font. Je leur ai ouvert ma maison, sans plus ». Dieu ne le fit pas au hasard, mais la tradition de fraude est ancrée dans ce village où l’on croyait pouvoir, cette fois encore, cacher un éléphant derrière une feuille de cacaoyer. Si certains de nos chefs de villages travaillent, d’autres sont manifestement‘’travaillés’’. N’en doutez pas. Dieu le fit ; et Dieu le sait. Quant aux faussaires du parti-Etat, ils n’ont pas eu de vergogne à se vanter de la besogne dont ils vivent : « Si vous, vous dormez, nous, on ne dort pas ». C’est donc à ce type d’insomnie ou de veille de fraude que certains devront bientôt leurs« victoires ».

Nous ne nous faisons aucune illusion sur cette volonté acharnée de fraude électorale. Mais si Elecam voulait (se) convaincre de son propre sérieux, sa hiérarchie gagnerait à vérifier l’origine et la résidence de ceux qui ont été charriés ce 03 février 2013 dans ce cette banlieue d’Eséka. Car les inscriptions dégotées ce jour scellent son discrédit. Par ailleurs, l’opinion serait intéressée que la Conac évalue l’ampleur de cette turpitude électorale au niveau national, cette banlieue d’Eséka n’étant que l’arbre qui cache la forêt. Le souci d’Elecam étant cependant d’atteindre les sept (7) millions d’inscrits annoncés ou imposés, nous craignons qu’on ne cherche à y parvenir « coûte que vaille ». Aussi doutons-nous que la vérité civique des inscriptions soit la préoccupation d’Elecam en ce moment.

Cette institution voulait convaincre l’opinion nationale et internationale qu’il n’y aura pas de doubles inscriptions, pas de doublons. Il se trouve cependant que les doubles, triples et multiples inscriptions sont déjà‘’biométriques’’. Elles se perpètrent déjà, qui plus est par les soins d’Elecam, l’Etat du Cameroun n’ayant pas sécurisé l’identité nationale des Camerounais. Pour cause de calculs électoralistes, la « gratuité » en confirme la braderie et ouvre la voie à la fraude identitaire, comme si l’on nous voulait interchangeables. Hier, on faisait voter des électeurs vivants en lieu et place des morts inscrits ; et des vivants votaient à la place d’autres vivants. Aujourd’hui, comme on n’arrête pas le progrès, le régime semble avoir choisi de faire de nous des clones électoraux : l’un peut être l’autre ; l’un sera donc l’autre, puisque l’un vaut l’autre…

Cette défaillance d’Etat en matière d’identité nationale est une sévère hypothèque pour Elecam, pour les consultations électorales et pour l’expression de la démocratie électorale au Cameroun. Je voudrais que chacun en eût mesuré le tragique pour une nation où tout reste à concevoir et à (re) bâtir.

Et c’est le président de la République qui en a décidé ainsi, démocratiquement seul. Il l’aura annoncé en personne, publiquement, officiellement, un 31 décembre, comme pour livrer aux militants du parti-Etat la clé de ce nouveau code de fraude électorale. Car au vu de ce qu’on a surpris dans le Nyong et Kelle, ses partisans ont bien compris, au nom de la gratuité, que l’année 2013 sera l’année de la grande réalisation biométrique de la fraude électorale ! Il fallait tout de même du génie en matière de flibusterie électorale pour trouver qu’en matière de fraude biométrique, la gratuité de la carte d’identité permettrait d’instrumentaliser la biométrie même – qui est censée combattre la fraude…

Quand il vous disait, le président, que vous étiez atteint de myopie …biométrique !

Par Hon. Charly Gabriel Mbock
Porte-parole de l’UPC



 

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Lire aussi : Maurice Kamto accuse ELECAM d'entretenir la fraude pré-electorale au Cameroun

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