Lions indomptables. Cameroun - Refondation du football camerounais: Entre purge et saupoudrage, le sport roi attend son Renouveau

Christian TCHAPMI | Le Messager Jeudi le 04 Septembre 2014 Sport Imprimer Envoyer cet article à Nous suivre sur facebook Nous suivre sur twitter Revoir un Programme TV Grille des Programmes TV Où Vendre Où Danser Où Dormir au Cameroun
Alors que le peuple, ulcéré par la campagne désastreuse des Lions indomptables au Mondial 2014, attend désespérément que la sélection nationale fanion et le sport-roi en général sortent de l’endormissement dans lequel ils se sont emmurés il y a plus d’une décennie, les pouvoirs publics, eux, préfèrent entonner l’hymne de la refondation

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Alors que le peuple, ulcéré par la campagne désastreuse des Lions indomptables au Mondial 2014, attend désespérément que la sélection nationale fanion et le sport-roi en général sortent de l’endormissement dans lequel ils se sont emmurés il y a plus d’une décennie, les pouvoirs publics, eux, préfèrent entonner l’hymne de la refondation sous des fondements brinquebalants comme le replâtrage, la chasse aux sorcières, le règlement de compte et la navigation à vue. Chronique d’un malade agonisant en quête de guérison.


1.- Samuel Eto’o et Rigobert Song en victimes expiatoires ?

Grand ménage, Tsunami, remaniement, dératisation, vaste campagne de restructuration… Les vocables en viennent à manquer pour qualifier le vent qui souffle sur la sélection nationale fanion depuis deux semaines déjà. Staff technique, médical, administratif et même l’équipe dans son ensemble, a subit des réaménagements dont les retentissements n’ont d’égal que la liesse populaire et l’euphorie avec laquelle les fans de football ont accueilli la nouvelle. Normal. Le peuple a soif de sang et on lui en sert à profusion. Martin Ndtoungou Mpilé qui n’a jamais eu le courage de contester les choix (parfois tortueux) de Volker Finke, a été délogé en remplacement d’Ibrahim Tanko, l’homme de main du technicien allemand qui avait réussi depuis son arrivée au Cameroun, à envoyer le pauvre ancien sélectionneur des Lions Juniors au garage. Pour accompagner ce duo dans ses nombreuses missions, Bonaventure Djonkep et Alexandre Belinga qu’on présente comme des techniciens d’expérience à la notoriété incontestée. Jacques Songo’o mis à l’index dans une affaire d’achat de places, passe sa paire de gants à Alioum Boucar, ancien portier des fauves qui n’a suivi aucune formation d’entraîneur depuis qu’il a raccroché ses crampons en 2006. Rigobert Song que beaucoup accusent d’avoir ouvert un comptoir au sein de la tanière, vient lui aussi d’être dégommé. Le désormais ancien Team manager cède son siège à Alphonse Tchami.

Un remaniement qui intervient trois jours seulement- après la renonciation de Samuel Eto’o que Finke n’a pas trouvé bon de convoquer, obligeant le quadruple ballon d’or présenté par certains comme le cancer d’une tanière à problèmes, a tirer sa révérence pour se consacrer à son nouveau club et prendre soin de sa famille. Adoum Garoua qu’on connaît taiseux et amorphe s’est donc soudainement mué en « coupeur de têtes » alors que parmi les responsables de la débâcle des Lions en Coupe du monde Brésil 2014, il arrive en tête de course. Paul Biya très préoccupé par son séjour princier dans les grands hôtels de Suisse n’a pas cru bon de frapper lui-même du poing sur la table. Inconditionnel de la gouvernance par télécommande, il a laissé le soin à son incompétent de ministre, de donner au peuple ce qu’il aime de mieux : un nouveau sujet de divertissement pour gagner du temps et éloigner les esprits éveillés du vrai débat. Résultat des courses : Volker Finke qui a conduit le Onze national à une Coupe du monde calamiteuse se voit nommé à nouveau (alors qu’il a un contrat de deux ans). Une marque de confiance que ne veut surtout pas bouder l’ancien coach de Fribourg. Lui qui ne jure plus qu’au nom de la reconstruction de l’équipe nationale fanion dont il dit en être le chef d’orchestre. En témoigne la liste des 25 joueurs qu’il a convoqués pour affronter la Rd Congo le 06 septembre prochain et la Côte d’Ivoire le 10 septembre.


2.- Replâtrage et navigation à vue comme devise

Mais la question de fond reste lancinante. La mise à l’écart de tous les noms suscités suffit-elle à résoudre le problème du football camerounais ? Avec ce Tsunami à tête chercheuse, aura-t-on l’assurance d’avoir extirpé le mal ? Si ceux qui s’autoproclament médecins aujourd’hui sont eux-mêmes des malades à un stade terminal, comment peut-on fonder des espoirs sur cette thérapie ? Pour dire vrai, nous sommes là de nouveau à bord d’une pinasse soudée à la va vite qui doit pourtant affronter des flots houleux avec ses replâtrages et des initiatives inappropriées ou mal exécutées qui ont pignon sur rue. A la grande fierté de leurs initiateurs et au grand dam de tous les amoureux de foot et autres entrepreneurs désireux d’investir ce champ ailleurs fructueux de l’activité sportive. Faut-il donc en pleurer? Peut-être porter le deuil de notre sport-roi que le mauvais diagnostic de ces médecins en mal de sensation ont appliqué au grand malade.

Les exemples foisonnent et les conséquences s’amoncèlent au fil des années. On vit un siècle de paroles qui n’ont jamais été suivies par des actes sur le terrain. Le stade Ahmadou Ahidjo de Yaoundé construit en 1970 est d’une capacité de 38 509 places assises et accueille depuis plus d’un demi-siècle, les matchs de l’équipe nationale de football du Cameroun ainsi que les matchs de certains clubs des championnats d’élite. Il a accueilli en 1988 le jubilé Roger Milla. Ahmadou Ahidjo en lançant ce vaste projet de construction de quatre stades omnisports, entendait pallier le déficit du Cameroun en infrastructures sportives, en dotant à terme, tous les chefs-lieux de provinces et villes du Cameroun d’infrastructures sportives adaptées à la pratique du sport en général et du sport d’élite en particulier, permettre au pays dont on vante le talent de ses fils, d’accueillir à court terme, des événements sportifs de haut niveau. Mais le régime Biya et ses tristement célèbres « Grandes ambitions » a posé un tacle irrégulier à cet ambitieux projet, choisissant de privilégier la stagnation.

Le site du futur grand stade Paul Biya, lui, s’étend sur 100 ha. Il était prévu pour compter 60.000 places. Etaient également prévus sur le même site la construction d'un Centre de sports nautiques et d'un hôtel trois étoiles d'une capacité de 200 lits. Le coût total des investissements de cette première phase était estimé à 94,6 milliards de Fcfa contre 170,8 milliards pour la seconde étape.

Hélas ! Les travaux n’ont jamais débuté, sept ans après l’annonce de leur lancement. La Cameroon Development Corporation (Cdc) et les populations qui occupaient les lieux, ont été délogés. Mais, elles n’ont pas encore reçu d’indemnisations. Or, plus de 300 millions Fcfa devaient être redistribués aux déguerpis. Sans suite. En 2009, lorsque le site a été déblayé par la Mission d’aménagement et d’équipement des terrains urbains et ruraux (Maetur), c’était parce que, a priori, la première phase du Programme national de développement des infrastructures sportives (Pndis) devait s’achever en 2011, mais ledit Pndis, comme on le clame ici, est mort. Et le site est resté vierge. Aucun bulldozer n’est repassé par là.

Pourtant, c’est depuis plus de dix ans que le gouvernement camerounais, en partenariat avec la République populaire de Chine, grâce à Exim Bank of china, a lancé un ambitieux programme de développement des infrastructures Pndis. Lequel avait pour ambition de doter le Cameroun d’infrastructures sportives de qualités à la pratique du sport.

Pire, les clichés de la vétusté visibles au stade Ahmadou Ahidjo de Yaoundé, le « championnat professionnel » baigne dans un amateurisme sans précédent pendant que le football féminin est à l’abandon. L’équipe nationale séniors mérite un traitement princier doublé de toutes les attentions alors que les sélections inférieures (Cadets, Juniors, A’) végètent. Entre arriérés de salaire, absence de primes de matchs et grèves à répétitions, le quotidien de ces pauvres joueurs et encadreurs est tout sauf un modèle de professionnalisation.


3.- Les vrais remèdes moisissent dans les tiroirs

Or, ce football camerounais a été admis plusieurs fois en salle d’opération. Plus récemment, en mai 2010 à travers un forum national à lui consacré. Lequel avait pour objectif d’élaborer et de transmettre au gouvernement une stratégie globale de développement du football au Cameroun. Etaient réunis autour d’une même table, tous les anciens ministres en charge des sports, tous les anciens capitaines des Lions indomptables, les experts de la Fifa et de la Caf, tous les anciens présidents de la Fécafoot, l’essentiel des joueurs de la Coupe du monde de 1990, des députés, des chefs traditionnels et même tous ceux des Camerounais qui ont quelque chose à proposer dans l’optique du développement du sport-roi. Tout comme les opérateurs économiques représentés par le Gicam, et des acteurs de la société civile.

Ces éminences grises tels des chirurgiens, avaient fait le tour des plaies qui paralysent le développement du foot à l’instar de l’environnement institutionnel et la gestion des sélections nationales, l’organisation administrative de la Fécafoot et des ligues décentralisées, le football Jeunes, le football féminin, la création de l’Ecole supérieure de football, Le football amateur, le football professionnel, le Beach soccer, le Futsal, le football corporatif, le football vétérans, l’éthique dans la pratique et la gestion du football, les infrastructures, les rôles des collectivités territoriales décentralisées dans le développement du football…Les travaux avaient pour base la Convention standard mise à la disposition de la Fécafoot par la Fifa. Au bout du processus, on avait abouti à la Convention entre le Ministère des Sports et de l’Education physique (Minsep) et la Fécafoot. Bien plus, la Charte des sports promulguée en 1996 qui attendait toujours des décrets d’application pour environ quinze articles avaient été modifiée. S’en sont suivis en novembre 2010, les Etats généraux du sport et de l’éducation physique. Pendant deux jours, experts et spécialistes se sont penchés sur ce corps agonisant, afin de trouver dans de brefs délais des médicaments nécessaires et susceptible de lui redonner sa santé de fer d’antan. Michel Zoah alors ministre des Sports, avait donné le ton de cette opération qu’il a lui-même qualifié de forum de la relance du mouvement sportif national. Non sans prescrire méthodologie et contribution massive de la part de tous les participants. Il fallait s’assurer de l’opérationnalisation des recommandations faites au sortir des précédents travaux. Les travaux avaient accouché d’un chapelet de résolutions qui n’ont malheureusement été exploités. Acheminées à qui de droit, ces dossiers sont depuis lors, soigneusement rangés dans les placards du Secrétariat général de la présidence de la République.


4.- L’urgence d’une vraie thérapie

Faut-il en rire ou en pleurer ? Ni l’un, ni l’autre. Sinon de travailler à redorer notre blason en commençant par l’humilité qui n’est pas la chose la mieux partagée chez nous. Reconnaître que nous sommes désormais au fond du trou nous aidera sans doute à mieux peaufiner une stratégie de remontée. Pour cela il nous faudra des personnes capables de nous aider à arracher le feu sacré du succès certes. Mais il nous faudra également l’environnement idoine qui ne devra plus s’encombrer de ceux qui sont aujourd’hui aux affaires et qui ont assez compromis l’avenir du sport-roi en se compromettant eux-mêmes. Nettoyer l’administration des clubs, en appliquant les préceptes du professionnalisme, pourrait être par exemple un bon début avant une réflexion sur l’avenir en diagnostiquant le présent.

On sait depuis des lustres que le football camerounais est malade et les signes cliniques de son agonie sont si visibles qu’on en vient à se demander combien de temps il pourra encore tenir debout ou faire semblant. Nos équipes nationales ont pris du plomb dans l'aile. Nous avons l'obligation de redorer notre blason. Ceci passe par une prise de conscience effective de tous les acteurs. Les moyens humains, par exemple, existent et sont de bonne qualité. Il suffit simplement de mutualiser, sans fioriture, les efforts et les compétences. Mettre un stop à cette politique de l’autruche des responsables du Minsep et de la Fécafoot qui a contribué à compliquer et aggraver la maladie. Car depuis de longues années, les indicateurs sont au rouge. Suffisant pour comprendre qu’il faut sauver le soldat football camerounais.

Christian TCHAPMI

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