Affaire Marafa. Cameroun - Livre - Marafa: le choix de la diversion

Labaran Mamouda et René Atangana | La Météo Jeudi le 20 Novembre 2014 Culture Imprimer Envoyer cet article à Nous suivre sur facebook Nous suivre sur twitter Revoir un Programme TV Grille des Programmes TV Où Vendre Où Danser Où Dormir au Cameroun
A court d’arguments, l’ex-Minatd veut gagner la bataille de l’opinion en manipulant à tout va.

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Sain et saint. Tel peut être résumé l’esprit et la lettre de «Le choix de l’action. Mes dix ans au Minat», l’ouvrage que vient de sortir Marafa Hamidou Yaya aux éditions du Schabel. Il y a d’abord la période circonscrite pour cette tirade pro domo : 23 juin 2002-9 décembre 2011. La mémoire sélective du célèbre prisonnier du secrétariat d’État à la Défense en charge de la gendarmerie (Sed) l’amène à mettre délibérément sous le boisseau ses années de secrétaire d’État n°2 au ministère des Finances (novembre 1992-juillet 1994), conseiller spécial du président de la République (juillet 1994-décembre 1997), secrétaire général de la présidence de la République (décembre 1997-avril 2001) puis ministre d’État, secrétaire général à la présidence de la République (avril 2001-août 2002).

Amnésie ou mauvaise foi ? Marafa Hamidou Yaya n’est «pas homme à régler des comptes». Soit. L’histoire est parfois bien têtue. Dans sa «Lettre ouverte d’un condamné à vie à son bourreau», publiée début juin 2012, Paul Eric Kingué dénonce un homme «sans épaisseur morale» et qui a «bâti [son] ascension sur ces contre-valeurs [qu’il défend] aujourd’hui». «Calomniateur vous l’êtes, menteur vous l’êtes, affabulateur vous l’êtes, corrompu vous l’êtes, ingrat vous l’êtes, manipulateur vous l’êtes au centuple», s’écrie l’ancien marie de Njomé Penja.

Moulé au système qu’il aura servi pendant deux décennies, l’homme s’absout aujourd’hui de tout péché. Il se présente davantage comme une victime expiatoire : les autres incarnent le mal ; lui se veut un patriote acharné. Le beau rôle. La théorie de la victimisation à vue de nez. Ses intentions se lisent en filigrane sous cette phrase : «Il se peut que je recouvre la liberté, et alors mon action s’exercera à nouveau dans toute sa plénitude.» Il est légitime d’avoir des ambitions pour la magistrature suprême.

Il est, surtout, important d’avoir un minimum d’honnêteté pour ceux qu’on veut gouverner. En commençant par livrer son propre bilan de la gestion de la chose publique. En faisant preuve d’un minimum d’humilité et, surtout, de sang-froid et de charisme. Dans le cas de l’ex-Minatd, hélas, «Le choix de l’action» se révèle comme le choix de la manipulation de l’opinion.

«Au-delà du récit des faits et des événements, ma chronique vise donc à montrer que le Cameroun a un besoin urgent de réformes et que ces réformes sont possibles.» Le nouveau «réformateur», 10 ans d’administration territoriale, n’a jamais pu changer quoi que ce soit au dispositif politique, administratif ou institutionnel. C’est un torrent de lacrymales qui risque de ne point le grandir auprès de ceux qui nourrissaient encore un brin d’estime pour sa personne.

Le mal, c’est les autres. Le preux Marafa a géré le «mal» à l’insu de son propre gré. Ministre des libertés et des élections, il ne se reconnaît dans aucun acte répressif ni tripatouillage lors des consultations avec les citoyens en âge de voter. Et d’asséner cette sentence sans frais : «J’ai d’autant moins de raison de ne pas assumer mon action que je n’ai jamais servi Paul Biya, mais l’intérêt supérieur de la nation.» -Responsable ; pas coupable. On connaît la musique.

Quelques clichés, pris au hasard de l’histoire, permettent de comprendre à quel point Marafa Hamidou Yaya est un fieffé manipulateur. Au soir du 9 octobre 2011, il se pourlèche les babines quant au bon déroulement de l’élection présidentielle qui «s’est déroulée dans le calme, l’ordre et la transparence». «Il s’agit, explique-t-il, d’une exigence républicaine à verser dans la symbiose entre d’une part les aspirations profondes des citoyens camerounais à plus de liberté et, d’autre part, l’engagement et la détermination constants du président de la République, Son Excellence monsieur Paul Biya, à consolider notre modèle de démocratie.»

Le 9 février 2012, Marafa Hamidou Yaya est à Garoua «pour remercier la base du Rdpc et des partis alliés qui ont pris part à la victoire du candidat du Rdpc à la dernière élection présidentielle». Il est à la manœuvre pour la mobilisation pour une cause nationale : «Je suis là parce que le chef de l'Etat nous a demandé d'aller mobiliser la base dans la perspective des échéances futures, les législatives et les municipales, mais aussi de venir participer activement à la refonte des listes électorales qui sera lancée dans les prochains jours. Il faudrait faire en sorte que plus de personnes s'inscrivent sur les listes électorales.» Il encense alors Paul Biya, aujourd’hui devenu un «personnage disjoint, insaisissable, dissimulant des gouffres intérieurs insondables». La mémoire courte, on vous dit !

Du fond de son cachot, Marafa Hamidou Yaya  qui n’a «jamais servi Paul Biya, mais l’intérêt supérieur de la nation» -on dirait un paradoxe ou alors une trahison, puisque c’est bien lui, Biya qui l’a sorti de l’anonymat et l’a nommé à de très hautes fonction- est allé exhumer cette forte pensée de Victor Hugo : «Sans boue aux pieds, ni honte au front, ni haine au cœur». Nous lui renvoyons cette autre réflexion, celle-là d’Ahmadou Kourouma : «Il n'y a que le désert qui guérisse le désespoir : on peut y pleurer sans crainte de faire déborder un fleuve».

 

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