Cameroun - Football. Cameroun - Portrait: Iya Mohammed et ses faux amis

Aziz Salatou | Le Jour Samedi le 23 Aout 2014 Opinion Imprimer Envoyer cet article à Nous suivre sur facebook Nous suivre sur twitter Revoir un Programme TV Grille des Programmes TV Où Vendre Où Danser Où Dormir au Cameroun
Le président de la Fecafoot est l'une des personnalités les plus controversées du Cameroun.

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Le jeune lya (grand-père en foulfouldé) est né le 25 août 1950 à Garoua. C'est peut-être son homonymie d'avec son aïeul peulh de Bibemi, qui le pousse à intégrer, jusqu'à l'exsuder, le poulakou. Ce code des valeurs qui s'apparente au machisme des Occidentaux et qui ne manque pas d'esprit chevaleresque. Le poulakou prône la frugalité, la patience à toute épreuve, l'endurance inébranlable à la douleur, la grande pudeur, la fidélité en amitié jusqu'à la dévolution ... le flegme. Le poulakou est un accomplissement chez les hommes de l'ethnie de lya Mohammed.

Très tôt, le jeune lya, à en croire ses proches, démontre des signes d'une vive intelligence. Il a un oncle haut fonctionnaire qui, plus tard, fera une carrière de diplomate. Cet oncle le recueille et l'élève avec ses enfants. Quand il est affecté à un poste d'ambassadeur au Nigeria, il amène son protégé. C'est en grande partie dans ce pays qu'lya Mohammed va faire des études et obtenir une licence en sciences économiques. Plus tard, de retour au Cameroun dans les années 1975 il n'a pas du mal à se faire intégrer dans la Fonction publique. Commence une carrière dans le privé comme Fondé de pouvoir à la Bicic à Douala. Entre 1975 et 1976, il est nommé chef d'agence Bicic à Limbé. Puis, il est promu directeur général adjoint de Selcam Sa, entre 1977 et 1981 à Douala.
En 1981, il sera le représentant de la Sodecoton à Douala, jusqu'en en 1983 En octobre de la même année, lya Mohammed est rappelé par son entreprise à son siège à Garoua; il vient d'y être promu secrétaire général. Le putsch du 06 avril emporte le directeur général de l'époque et c'est tout naturellement que le poste est confié à lya Mohammed, en mai 1984. Il faut croire que le jeune Dg de 34 ans tout juste entend révolutionner la vieille entreprise héritière de la Compagnie française de textile (Cfdt), l'entreprise cotonnière fondée aux temps de la colonisation. C'est dans ce souci de rénovation et d'humanisation que le jeune Pdg qui, à l'époque parle à peine une phrase correcte de français, décide de mettre un peu d'ambiance dans la société. Avec des cadres, il crée une équipe de football en 1989 Coton sport de Garoua, qui, en quelques années part du championnat corporatiste pour gagner le championnat du Cameroun. Les résultats de l'équipe fascinent. Le club, aujourd’hui, a un centre de formation, des terrains de jeux, un hôtel en construction, et va bientôt inaugurer son stade. Cette organisation de l'équipe est saluée par les délégués de la Fecafoot des régions septentrionales. Ils saluent le talent du principal acteur de cette réussite en élisant lya Mohammed comme leur représentant lors de l'élection. C'est un adoubement qui va l'amener à la tête du football camerounais, au gré d'une succession de ce qu'il appelle pudiquement des «coups du sort».


Raison

A son arrivée, l'équipe d'lya commence par faire le ménage. On chasse le personnel inutile et on éponge les arriérés. Le manager s'attaque par la suite à la comptabilité de la maison qu'il apure. Les dettes sont payées et de nouveaux hommes sont mis en place.

lya tient avant tout à faire gérer le football par les footballeurs. Il commence son casting et comme à son habitude, demande conseil à des aînés qui sont dans les arcanes du football depuis des années. Il veut prendre David Mayebi pour second. Selon nos sources, ces aînés le lui déconseillent vivement, au prétexte que cette ancienne gloire du football «est un filou». lya Mohammed, sans dire non tout de suite à ces personnes qu'il respecte, a d'autres considérations. David Mayebi l'a soutenu lorsqu'il postulait à la tête de la fédération. Par gratitude il ne peut pas s'en éloigner: le poulakou est plus fort que la raison. Il le nomme -vice-président.

La séparation des deux hommes va avoir des années plus tard des allures dramatiques. «En pleine assemblée générale, Mayebi, accablé par la lecture de ses frasques que lui faisait lya, va menacer de tout déballer. Celui-ci répond: «déballe tout ce que tu veux, mais, moi je ne dirais rien sur toi», lui a répondu lya. «D. Mayebi a alors éclaté en sanglot», nous a raconté un participant de cette assemblée générale.


Iya ne file pas du bon coton

Roger Milla, icône mondiale du football est introduit à la Fecafoot par la hiérarchie. lya insiste pour lui faire une place de choix: président d'honneur de la fédération, avec émolument. La légende du football, très vite ne se contente pas de ce placard doré. Il s'active. Exige des têtes, critique Samuel Eto'o qui lui a succédé dans le cœur des supporters du football camerounais, et qui est une star planétaire. Il veut faire tomber des administrateurs. lya Mohammed refuse, c'est le clash, avec invectives en public.

Dans cette cohue, le football engrange des résultats dans les années 2000. Le Cameroun est adulé dans le monde entier pour ses succès. L'argent afflue. Les joueurs sont sollicités dans les grands championnats. Au pays, ils sont adorés comme des dieux. Désormais ils gagnent de l'argent qu'ils dépensent comme des feymen. Ils distribuent des cadeaux à tour de bras. Aux fonctionnaires du ministère des Sports, aux membres de la fédération. Les politiques les citent en exemple de réussite. Ils prennent la grosse tête. Ils n'aiment pas la distance qu'Iya, qui refuse leurs cadeaux, installe entre eux et lui. Leurs succès, selon eux, sont dus à leur talent plutôt qu'à une organisation qu'ils jugent inexistante.

Ils fustigent du reste la gestion des retombées de leurs résultats, désignent les membres de la fédération comme des gangsters. Pour eux lya Mohammed et sa bande, s'enrichissent sur leurs dos. Les footballeurs ne jouent plus. Ils sont enhardis par des courtisans qu'attirent les immenses fortunes qu'ils se sont faites et poussés par des concurrents de lya que les multiples échecs lors des élections à la Fecafoot ont désespérés. Ils jettent leurs forces dans une lutte qu'ils sont sûrs de gagner. Ils sont déterminés à chasser « les imposteurs, lya et sa bande de Tsinga». Ils organisent des marches, suggèrent des émeutes. lya est amer.

C'est clair que lya ne file pas un bon coton avec les footeux. Mais ce n'est pas l'essentiel de ses soucis. Il a, dès sa nomination à la direction générale engagé une rude bataille pour maintenir la Sodecoton à flot. Le coton africain, se trouvant lésé par les subventions que les Américains donnent à leurs agriculteurs pour soutenir leurs productions vouant les cotonniers africains à une mort certaine, lya est en pointe de ce combat.

Aziz Salatou (Portrait paru dans l'édition n°10 du Point du Jour)

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