Cameroun - Politique. Les hold-up électoraux du Rdpc

Le Jour Vendredi le 19 Juin 2015 Opinion Imprimer Envoyer cet article à Nous suivre sur facebook Nous suivre sur twitter Revoir un Programme TV Grille des Programmes TV Où Vendre Où Danser Où Dormir au Cameroun
Le Sdf vient de commémorer les 25 ans de son existence et j’ai entendu beaucoup de monde, même certains de ceux que je croyais de bonne foi, soutenir à partir des résultats électoraux, que le SDF est vomi par les populations camerounaises.

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Comment peut-on recourir à un tel critère alors qu’on sait que les élections ne sont pas crédibles ? Devrait-on alors en conclure que les résultats du RDPC qui depuis frisent aujourd’hui les 100% dans toutes les élections « démontrent » qu’il fait l’unanimité au sein des Camerounais ?
Et si oui, pourquoi les gens se plaignent-ils plus que jamais auparavant? C’est pourquoi, pour ma part, je rappellerai les critères à l’aune desquels se juge une élection de qualité et je vous réveillerai quelques « hauts faits électoraux » du parti qui nous « gouverne ».

1) Des règles électorales justes,claires, consensuelles et conformes aux normes internationales ;

2) Ces règles électorales doivent être respectées par toutes les parties prenantes ;

3) La loi électorale ne doit pas être conçue de manière à favoriser un candidat ou un parti, de manière à permettre des fraudes légales et partant, la confiscation légale du
pouvoir ;

4) Toutes les institutions impliquées dans les élections jouent correctement leurs rôles, sans parti pris ;

5) Les règles concernant le financement des campagnes électorales ne favorisent ni ne défavorisent personne en particulier ;

6) Une séparation très claire entre l’Etat et les partis politiques. Et les biens publics ne sont pas utilisés pour avantager un candidat en particulier ou un groupe de candidats ;

7) Toutes les autorités de justice concernées par les élections soient indépendantes et honnêtes.

8) L’administration publique doit rester neutre : elle ne doit favoriser aucun candidat ou parti.

9) Les moyens de l’Etat ne doivent pas être mis au service d’un candidat ou d’un parti

10. Les vrais résultats doivent être proclamés

Lorsque nous comparons ceci avec ce qui se passe au Cameroun, nous sommes très loin du compte.

Quelques florilèges sur les hold up électoraux du RDPC.

Exemple 1 : 1992

Le SDF, sous la houlette de l’Union pour le changement, se présente à l’élection présidentielle. Tout le monde l’annonce vainqueur et Frances Cook, l’ambassadrice des USA a même déjà affiché les résultats dans les locaux de sa représentation diplomatique. Avant la proclamation des résultats, le présumé vainqueur est assigné en résidence surveillée chez lui et sa province d’origine est mise sous état d’urgence, mettant ainsi toute la population du Nord-Ouest dans le même sac, sans se demander qui a voté pour ou contre le SDF dans ladite circonscription

Le camarade Kenfack, notre représentant à la Commission locale de vote est enfermé et subit toutes les tractations et menaces pour signer de faux procès verbaux. Comme il ne cède pas, il est brutalisé, battu et annoncé mort. Le sous-préfet qui a requis les forces de l’ordre, avec gourdins et gaz lacrymogène, maintient à bonne distance les militants du SDF qui campent jour et nuit pendant près d’une semaine devant la sous-préfecture.

Rien n’y fait. A ce jour, les résultats de cette élection n’ont jamais été proclamés et le RDPC gère depuis lors cette commune, sans état d’âme.

Exemple 3 : 1997 : Législatives dans le Diamaré

Le jour-même des élections, le président de la République sort un décret découpant la circonscription électorale du Diamaré et remettant les élections au lendemain. Qui d’autre, en dehors du RDPC pouvait constituer une nouvelle liste en une demi-journée ?

Exemple 4 : 2007 : Elections municipales à Douala.

10 procès verbaux, contrairement aux autres qui sont déposés au siège de l’ONEL, prennent la direction de la sous-préfecture. Les militants du SDF veillent devant le siège de l’Onel. Deux jours plus tard, ils voient le sous-préfet et les présidents des 10 bureaux arriver, encadrés par des militaires armés jusqu’aux dents. Comme ils les empêchent d’accéder au siège de l’ONEL, ils sont brutalisés et arrosés de gaz lacrymogène. De toutes les façons, les 10 PV finissent par être acceptés et sont convoyés à Yaoundé afin que le RDPC gagne !

Exemples 5 : 18 février 1997.

Haman Adama, député de l’UNDP, pour cause d’avoir gagné les législatives pour un parti autre que le RDPC, après avoir été déshabillé et sauvagement battu sous le regard attentif du sous-préfet par la milice de l’ancien Lamido de Rey-Bouba, décède. Son statut de député, élu du peuple, aurait dû constituer une circonstance aggravante et contraindre les mécanismes de la justice à se mettre rapidement et automatiquement en branle. Il n’en a rien été. Mais le fait qu’il était le plus grand défenseur du chef de l’Etat et de son parti dans son royaume lui conférait, selon les lois non-écrites du milieu, une immunité et une impunité plus grandes que celles pourtant bien constitutionnalisées du député immolé. Son homologue Koulagna Nana, plus chanceux, échappe miraculeusement à la mort ce jour-là et vit depuis exilé à Ngaoundéré sans possibilité de retour. Depuis, la justice s’est tue. L’UNDP s’est tue.

L’Assemblée, à majorité RDPC, s’est toujours tue. Le lamido, sans remords, est mort de sa belle mort, impuni, avec la satisfaction du devoir accompli ! Son successeur, digne fils de son père, a bien suivi les traces de son roi. Les Camerounais se souviennent encore avec effroi du préfet de Rey, tremblant et confus, à genoux devant le nouveau lamido. Non loin de là, M. Marafa Hamidou Yaya, ministre de l’Administration Territoriale, en tenue du RDPC, admirait cette scène que pour la postérité, un photographe aux aguets immortalisait. Le préfet à genoux et suppliant devant un chef traditionnel! L’histoire et la photo sacrilèges ont fait le tour du monde et des rédactions, mais les pouvoirs publics n’en ont pas fait un scandale. A tel point que même dans le gouvernement des Grandes Ambitions, le Mayo Rey a conservé son poste de Secrétaire d’Etat en charge de l’agriculture et du développement rural, en la personne du bien nommé Aboubakari Abdoulaye, un autre digne rejeton du défunt lamido.

Depuis 2013, un certain Célestin Yandal croupit dans les geôles féodalo-administratives pour avoir réussi le tour de force de s’être fait élire conseiller municipal UNDP au détriment du RDPC. Peut-être que ce sont ces hauts faits qui ont amené le Chef de l’Etat à nommer le Lamido de Rey Sénateur, Viceprésident du Sénat, et pour bien narguer les Camerounais, membre de la Commission Nationale des Droits de l’Homme !

Exemple 6 : Réunion pour les modalités d’inscription sur les listes à Balikumbat

A quelques mois de la présidentielle d’octobre 2004, John Kohtem,le président de la Circonscription Electorale SDF de Balikumbat,invité pour discuter des modalités d’inscription sur les listes électorales tombe dans un guet-apens et meurt sous les coups de gourdins de la milice de son Fon.

Les députés SDF, lors de la session de l’Assemblée de novembre suivant, demandèrent la levée de l’immunité du Fon pour qu’il réponde de ses actes. En pure perte et pour cause !

Tout comme le lamido de Rey, le Fon-député-maire de Balikumbat, à force d’intimidations et autres voies de faits, avait réussi à faire de son royaume une enclave RDPC perdue dans une région hostile à ce parti. Arrogant et sûr de lui, il a continué pendant longtemps à se bomber le torse et à parader dans le Nord-Ouest, jusqu’au jour où la pression internationale finit par obtenir la levée de son immunité.

Jugé et condamné à 15 ans de prison, un appel eut tôt fait de le libérer. Il est mort de sa belle mort, impuni, avec la satisfaction du devoir accompli. Quelqu’un peut-il nous dire quelle sorte de dispositifs les partis politiques auraient pu mettre sur pied pour parer à ces cas de violences ou sécuriser leurs résultats dans de telles circonstances ?
 

Jean Takougang, Militant du Sdf et ministre de l’Education et de la Formation au sein du Shadow Cabinet

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