Cameroun - Economie. Marchés publics : Le calvaire des prestataires

Mutations Lundi le 29 Juin 2015 Opinion Imprimer Envoyer cet article à Nous suivre sur facebook Nous suivre sur twitter Revoir un Programme TV Grille des Programmes TV Où Vendre Où Danser Où Dormir au Cameroun
Pourquoi les prestataires de l’Etat sont les plus pauvres, désespérés et à la merci des banques et fonctionnaires. Par Prince John Akere*

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Mauvaise évaluation des projets & partialité de clauses contractuelles entre Etat et prestataire

Les projets et marchés sont parfois conçus par des personnes n’ayant aucune maitrise du droit ou encore des connaissances techniques nécessaires.  Or, très souvent, les prestataires ne prennent pas suffisamment connaissance desdits documents avant la signature du contrat.    Par exemple, dans plusieurs cas, l’état retient 65% du montant du marché avant même le démarrage des travaux, ce qui rend impossible la bonne exécution des prestations, le remboursement des prêts auprès des banques, sans parler de la réalisation des bénéfices par les entrepreneurs.

Les défauts de paiement des factures du fait des lenteurs administratives et des goulots d’étranglement sont aussi à déplorer car, il faut parfois attendre des années, pour voir certains paiements approuvés.  Après avoir livré un marché avec le peu d’argent qui lui reste, l’entrepreneur, qui est sous le joug des taux d’intérêts très élevés sur les prêts octroyés par les banques (parfois jusqu’à 3% par mois), se voit obligé de suivre une démarche très onéreux pour l’obtention du paiement conséquent à ces prestations.

Souvent, ces paiements se font seulement après débordement des bénéfices du prestataire par l’accumulation de ces intérêts, le résultat étant l’endettement de l’entrepreneur auprès de la banque. Ainsi, les entrepreneurs son permanemment désespérés et passent leur temps à pleurnicher devant leurs familles et leurs partenaires commerciaux. « Mes factures ne sont pas encore réglées aux Finances » disent-ils souvent. La question qu’on se pose est celle de savoir si elles seront réglées un jour? Pourquoi ne pas révéler la vérité sur votre situation ? Jusqu’à quand pouvons-nous continuer à cacher cette vérité de ceux qui ont l’impression d’une richesse excessive des entrepreneurs du fait des chiffres qu’ils découvrent sur les documents manipulés par ces entrepreneurs, alors même qu’ils meurent des crises cardiaques provoquées par l’endettement ? Autant de questions sans réponse.

Le niveau élevé des frais bancaires

Avec le soutien de l’Etat, les banques ont mis en place une mafia qui permet à ces institutions de tirer leur épingle du jeu, c’est à dire, gagner des sommes faramineuses au titre des documents délivrés à des frais élevés aux entrepreneurs, documents qui, malheureusement n’ont aucun intérêt pour ceux-ci ou pour l’état qui les exige. En guise d’exemple, l’on pourrait se demander l’intérêt pour la banque de délivrer une garantie bancaire et une attestation de capacité financière aux entrepreneurs alors que, lorsqu’ils sont adjudicataires des marchés pour les quels lesdits documents sont délivrés, les banques refusent de financer les entrepreneurs en question? Quelle action, l’état, prend-il contre ces banques qui déçoivent non-seulement l’état mais aussi l’entrepreneur?  La conclusion est que ces documents sont vendus aux entrepreneurs et ne servent ni l’entrepreneur, ni l’état qui se voit incapable d’identifier le meilleur prestataire pour réaliser ses marchés.

Taux d’intérêt élevé

Certaines institutions de micro-finance exigent un taux d’intérêt de plus de 3% par mois, ce qui équivaut à plus de 36% par an.  En prenant le cas où il se passe un an entre la période d’exécution du marché et le paiement de la facture de l’entrepreneur, ce dernier sera obligé de payer une somme de 36% de la somme emprunté. On se demande ce qui peut bien rester pour l’entrepreneur lui-même. Pas plus que des dettes, assurément.

Nous ne devrons pas oublier que l’état retient déjà plus de 65% du montant du marché (syndrome du moins disant environ 30%, TVA 19.25%, IR 5.5%, enregistrement du marché 2%, bon fin 3%, dépôt de garantie 10%, assurance 3%, etc.), péages 10%. Après tous ceci, il ne reste que 25% du budget original du marché à l’entrepreneur de réaliser le marché, réaliser les bénéfices, repayer ses dettes ainsi que les intérêts. Ceci, peut-il être possible un jour?

 Quel sort attend l’entrepreneur? Pas plus que des dettes, assurément.  Que fait le gouvernement pour arrêter cette sorte de vol organisé? Existe-il une loi pour régler ces activités bancaires?  Si oui, quel mécanisme, l’état met-il en place pour que ces institutions financières soient ramenées à l’ordre.

Double taxation des entrepreneurs

Il est clair que plus de 80% des prestataires de service paient la TVA deux fois, soit par ignorance, soit du fait des circonstances échappant à leur contrôle.  En effet, ils achètent biens et matériaux auprès des revendeurs qui facturent la TVA, mais lorsqu’ils fournissent les mêmes à l’état, la TVA est déduit pour une deuxième fois.   Ceux qui en sont conscient déterminent ces excédents à la fin de l’année et réclament le remboursement mais l’état prend des années pour réagir et parfois, on n’aboutit jamais à ce remboursement.

 Autre situation grave, le taux d’imposition sur les bénéfices réalisés par les entrepreneurs à la fin de l’année. Il est bien vrai que nous sommes dans un système déclarative mais l’état donne des pouvoirs absolues aux autorités des impôts de contrôler et d’instituer à leur seul discrétion, ce qu’ils estiment être les revenus gagnés par les entrepreneurs, et dans certains cas, y compris les dépôts de garantie, les cautionnements de bon fin et d’autre sommes dument retenues par l’état, les contrôleurs d’impôts estiment que ces sommes appartiennent aux entrepreneurs.  L’état est-il une banque? Quel intérêt est versé sur cette somme après ce délai d’un an?

Les pots-de-vin

Il s’agit là des impôts officieux imposés par les autorités en charge du contrôle des marchés publics mais parfois, elles ont l’air d’être très officiels. Je parle ici des charges sur les commissions et sur le traitement des factures pour paiement, etc.  Le déplacement des commissions et des contrôleurs sur les chantiers est très onéreux, et les pourboires s’élèvent à 2% pour les personnes chargés du traitement des factures pour paiement aux Finances.

Il est bien vrai, le gouvernement fait tout pour éliminer le fléau mais le résultat n’est que futilité, car cela s’apparente à creuser un trou pour combler un autre ou à « créer plus des postes de péage ». Il suffit d’imaginer une situation dans laquelle l’état, après avoir fait mener une étude par les experts, consacre la somme de 10 millions de francs à l’exécution d’un projet que ses agents décident d’octroyer à un prestataire de service moins disant à 6 millions de francs, ce qui représente une rétention de 40%, ce que nous qualifions de “syndrome du moins disant”.

Après adjudication, les mêmes agents d’état retiendront 45% des 6 millions (TVA, IR, enregistrement du marché, garantie bancaire, cautionnement de bonne fin, assurances, etc.), c’est à dire, environ 2.5 millions de francs, ce qui laisse l’entrepreneur avec la nette somme d’à peine 4 millions de francs. On se demande par quelle magie l’entrepreneur pourrait-il réussir le marché avec ladite somme. Or, la banque attend pour sa part, de couper 3% par mois sur le montant prêté à l’entrepreneur.

Que restera-t-il pour l’entrepreneur? Les entrepreneurs sont donc obligés d’adopter les stratégies peu recommandables, c’est à dire réaliser les prestations de mauvaise qualité, corrompre les autorités ou frauder les documents afin de recevoir son paiement et d’abandonner le travail.  Toutes ces mauvaises politiques mis en œuvre par l’état encouragent la corruption.  Ainsi, l’état et l’entrepreneur continuent de payer les frais alors que les banques et les autorités corrompues s’enrichissent.

Il est donc impératif de trouver une solution. Le secteur des marchés publics a trois acteurs clés: l’état, l’entrepreneur et la banque.  Chacun a un rôle clé à jouer pour que notre nation tourne une nouvelle page (l’émergence à l’horizon 2035, par exemple).

Le Bureau national de référence pour les prestataires de l’état, mieux connu sous son nom anglais, National Reference Bureau for Government Contractors, et en abrégé, NARBUGCO, défend les principes suivants:

NARBUGCO vise à identifier et classifier les entrepreneurs. Et en ce faisant, créer la confiance, d’abord parmi les entrepreneurs, ensuite, entre eux et l’état et entre eux et les banques.  Grace à cette initiative, un forum sera mis en place pour permettre aux dits acteurs de se concerter sur la meilleure façon de reformer les aspects néfastes des règles du jeu, afin qu’elles soient plus transparentes et bénéfiques à toutes les parties.

NARBUGCO vise à assainir le secteur des marchés publics à travers la collecte des informations sur les entrepreneurs et l’exécution des marchés publics disponibles, a tout moment et dans tous les lieus, par le biais de son site web de classe internationale.

 NARBUGCO et son équipe d’experts feront tout pour s’impliquer auprès de l’état, dès l’étape d’étude de projet à celui d’octroi de marché, afin de protéger les intérêts des entrepreneurs à tous les niveaux.

NARBUGCO travaillera en étroite collaboration avec l’état afin de prouver qu’avec le présent code des marchés publics et règlement bancaire, il est impossible pour un entrepreneur de gagner sa vie en réalisant les marchés sans pots de vins et corruption. Ainsi, il faut donc tous changer.

Le forum de NARBUGCO servira aussi de lieu de rencontre des bailleurs de fonds et sociétés étrangers qui aimeraient travailler avec l’état du Cameroun, étant donné que le site portera les informations fiables sur la réalisation des marchés et les entrepreneurs.

NARBUGCO travaillera avec les experts dans tous les domaines pour offrir des formations aux entrepreneurs notamment sur le code des marchés publics, le code des impôts, le code bancaire, les assurances, et autres textes revues, et ceci sur une base régulier afin de tenir les entrepreneurs informés. NARBUGCO fera tout pour impliquer les autorités des secteurs en question dans les séances éducatives avec les entrepreneurs.

Les entrepreneurs sont les premiers partenaires financiers de l’état. Peut-être, avez-vous constaté que l’état compte sur eux pour financer les projets d’un montant total de 1,500 milliards par an! Savez-vous que les entrepreneurs sont capables d’influencer les lois de ce pays?

NARBUGCO attirera l’attention de l’état sur le fait que les entrepreneurs ont besoin d’un traitement spécial, de reconnaissance et de soutien de la part de l’état car leur rôle dans l’économie de la nation est incontournable.

Il est temps que l’activité de l’entrepreneur devienne une occupation et non seulement une occasion ou opportunité!  Ne mourront pas dans le silence. Il ne faut pas grand-chose pour s’affilier à NARBUGCO et défendre ses droits.  Rappelons-nous de notre slogan  «Unis, nous négocions; divisés, nous mendions»

*Président/DG du Groupe JEG Sarl, Yaoundé

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