Cameroun - Politique. Jean Jacques Ekindi: « Certains font comme si le Cameroun était né avec Biya. »

La Nouvelle Expression Vendredi le 24 Juin 2011 Opinion Imprimer Envoyer cet article à Nous suivre sur facebook Nous suivre sur twitter Revoir un Programme TV Grille des Programmes TV Où Vendre Où Danser Où Dormir au Cameroun
Le coordonnateur du Mouvement progressiste (Mp) vient de publier un essai aux Editions Amalthées en France. « Politiques du Cameroun et d’Afrique, les Défis », est un ouvrage de 458 pages qui fait un état des lieux d’un monde « déboussolé »,

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un aperçu sur l’histoire mouvementée du Cameroun depuis le temps des navigateurs portugais, les grands défis que ce pays et l’Afrique se doivent de relever pour espérer compter dans le concert des nations… Dans son Essai, il a choisi des grandes figures de l’histoire contemporaine qu’il considère comme véritables modèles de développement et d’épanouissement des peuples : Nelson Mandela, Kwame Nkrumah, Patrice Lumumba, Um Nyobé, Houphouët Boigny, Thomas Sankara, et plus près de nous, Barack Obama… Mais il se défend de vouloir présenter là une communication sur la campagne électorale de 2011 à laquelle il est candidat. Il nous donne ci-dessous quelques clés pour comprendre ce premier essai qu’il va dédicacer samedi prochain.

Vous dédicacez ce samedi un essai que vous venez de publier en France. Responsable de parti politique et député du peuple, pourquoi avoir choisi la France pour publier votre premier ouvrage ?

Nous avons édité le livre en France pour la simple raison que les éditeurs camerounais ont encore des réseaux de distribution très limités. Nous sommes en train de négocier avec cet éditeur pour voir si l’ouvrage peut par la suite être édité au Cameroun. Mais quand vous regardez le titre du livre : « Politiques du Cameroun et d’Afrique, les Défis », il s’adresse aux camerounais en priorité mais aussi aux peuples d’Afrique et des autres continents.

Pourquoi maintenant ?


La question est pertinente. Dans la mesure où il trottinait dans ma tête depuis longtemps l’idée d’écrire. Et pour écrire, il faut réunir certaines conditions dont la première est le temps. Je me suis fais violence pour trouver le temps de le faire. Il faut rappeler ici que beaucoup d’éléments de cet essai avaient été déjà rédigés et même publiés dans différents supports de communication depuis longtemps. Et c’est depuis l’année dernière que le livre est prêt. Parce que j’ai remis le manuscrit à l’imprimeur au mois d’Août 2010

La couverture de cet essai porte des photos de personnalités comme Nelson Mandela, Um Nyobe, Kwame Nkrumah, Thomas Sankara, Patrice Lumumba, Houphouët Boigny, De Gaulle, Barack Obama, Jean Jacques Rousseau… Quelle est la logique qui a guidé le choix de ces hommes ?


Ce sont des hommes qui, d’une manière ou d’une autre, ont été des symboles par leurs actions, leurs pensées ou par leur posture, et qui ont contribué au développement de l’Afrique. Il m’a semblé qu’il était nécessaire de leur rendre hommage à ce titre. Et dans le livre, on retrouve des pans de développement qui se rattachent à ces personnalités-là. Par exemple, nous avons aujourd’hui l’Union africaine. Mais avant on avait l’Organisation de l’Unité africaine (Oua) et le point de départ était le panafricanisme. Nous avons parmi ses précurseurs Kwame Nkrumah, Houphouët, Nelson Mandela...Tous ont grandement contribué à la libération de l’Afrique.

Quel rôle De Gaule qui est plutôt un colonisateur a pu jouer qui soit positif pour les peuples d’Afrique ?


Il faut retenir que c’est sous lui que l’empire français s’est disloqué. Près de dix sept pays africains en une année ont accédé à l’indépendance. C’est une période très significative de l’évolution de l’Afrique. Et l’on ne peut pas ignorer certains auteurs clés de cette période qui, pour les autres, ont consacré l’indépendance pacifique et pour les autres une indépendance très douloureuse.

Vous avez évoqué tantôt le panafricanisme qui est l’ancêtre de l’Union africaine. Vous oubliez un chantre de ce panafricaniste qui est aujourd’hui en sérieuse difficulté, à savoir le colonel Kadhafi de Libye. Quelle place vous lui donnez ?

Le colonel Kadhafi est certes important dans l’enracinement du panafricanisme. Mais il me semble qu’il est dans la conjoncture. Alors que les autres personnalités que j’ai citées s’inscrivent dans la durée. J’ai cité par exemple Jean Jacques Rousseau qui a vécu il y a plus de deux cents ans. Mais sa pensée continue d’influencer positivement les gens aujourd’hui. Il est vrai, le colonel Kadhafi est éminemment convaincu d’un certain nombre de choses. Mais son parcours est loin d’être linéaire. Je dirais même qu’il est assez sinueux. Parce que certains aspects de sa personnalité sont difficilement compréhensibles. C’est pourquoi il n’est pas simple de s’en référer comme les autres. Il a, certes, fait d’excellentes choses, notamment celle derrière laquelle il s’est attaché pour faire avancer l’Union africaine ; il a professé une volonté de faire avancer l’Afrique vers une espèce de fédération, mais à côté de tout cela, il y a une série de zones d’ombres qui en font un personnage complexe…

Est-ce parce qu’il règne depuis 40 ans sans partage ?

Pas du tout cela. Mais la manière de traiter les autres, notamment les Africains. Ce sont ses rapports avec les autres Africains, sa manière de traiter les femmes, qui sont sujet à caution. Il y a aussi ces tentatives de vouloir fusionner avec le grand Maghreb arabe ou encore avec la Tunisie et l’Egypte… Il a donc un parcours extrêmement confus qui ne permet pas que sans précaution, on le place dans la catégorie des hommes que nous avons cités.

« Politiques du Cameroun et d’Afrique, les défis ». Quel lien avec le Cameroun de 2011 ?

Quand un auteur produit un livre, ce sont les lecteurs qui en donnent un sens par l’interprétation qu’ils en font. Mais il me semble qu’on peut difficilement associer la réalité sociopolitique du Cameroun et de l’Afrique sans intégrer la durée. Et en ce moment-là, l’Afrique et le Cameroun dans l’espace et la durée sont indissolublement liés. Et en ce qui concerne le Cameroun, le lecteur va constater que nous sommes remontés jusqu’à l’antiquité romaine avec par exemple le récit du carthaginois Annon. Nous avons apprécié l’évolution du Cameroun dans la durée. Certains vont se comporter comme si le Cameroun d’aujourd’hui est né avec Biya et mourra avec lui par exemple. Non. Biya a imprimé sa marque, bonne ou moins bonne. Mais le Cameroun va continuer d’exister. C’est le sens de ce livre.

Le livre paraît quelques quatre mois avant l’élection présidentielle à laquelle Jean Jacques Ekindi est candidat. Quel rapport entre la sortie de ce livre maintenant et votre candidature ?


Je crois que ce livre traduit une facette importante de ma personnalité. Et il me semble que lorsqu’on n’a pas connu une personne ou qu’on ne l’a pas lue, on ne la connait que partiellement. J’ai repris plusieurs passages de ce livre et à la fin j’ai constaté que je n’ai rien modifié de fondamental. Cela traduit une constance dans mes idées et dans ce que je suis fondamentalement. Alors il me semble que lorsque l’on veut se présenter à une élection présidentielle, qu’on se connaisse d’abord soi-même. Et que ceux dont vous voulez solliciter les suffrages vous connaissent eux-aussi. Cela dit, on peut croire que ce livre a été écrit pour la campagne présidentielle. C’est inexact pour un certain nombre de raisons. La première, et je vous l’ai dit, beaucoup de passages de ce livre ont été déjà rendus publics par le passé. Donc il ne me semble par absolument indispensable d’écrire spécialement un ouvrage pour aller à l’élection présidentielle. La deuxième raison c’est que cet essai n’est pas un programme de campagne électorale. Et donc pas directement lié à ce qui va se passer. Même s’il aborde une série de problèmes dont certains sont d’une brulante actualité. Il est certes opportun pour la campagne mais ce n’est pas un livre de campagne. Il va au-delà.

Quelle est la part du réel et de l’imaginaire dans ce livre ?

Tout ce qui est analyse est une tentative d’appréhension du réel. Il y a très peu d’imaginaire pur qui soit lié à un rêve que l’on élabore. Parce que le roman met en mouvement des personnages et des situations imaginaires. Ce livre essaie de coller le plus possible à la réalité. Et quand bien même il fait des projections, ces projections doivent rigoureusement intégrer la réalité.

Quel est le public cible de cet essai ?


Ce sont les Camerounais, les Africains et les citoyens d’autres continents qui essaient de comprendre le Cameroun et l’Afrique. Et chacun pour des motifs qui lui sont propres. Parce qu’il y a soit des amoureux de l’Afrique, soit des opérateurs économiques qui veulent bien appréhender l’Afrique avant de s’y aventurer pour leurs affaires, soit des hommes politiques qui veulent comprendre la situation de notre continent. Quand on dit par exemple que l’armée française est engagée en Côte d’Ivoire ou en Libye et qu’il y a des Français qui y meurent ou des soldats français qui y tuent, même le Français ordinaire aimerait avoir des informations sur ces pays. Un livre comme celui-là leur permet d’avoir des informations sur l’histoire et la géographie que seule la presse ne peut leur fournir succinctement et ponctuellement. Quand j’évoque les relations entre la France et le Cameroun, je ne me limite pas à ce qui se passe aujourd’hui. Je les évoque depuis l’époque coloniale. Et ces informations documentées intéressent aussi les jeunes Camerounais et les chercheurs.

Est-ce qu’on peut dire que le virus de l’écriture a piqué Jean Jacques Ekindi et qu’il faut s’attendre à d’autres publications dans les prochains mois ?

Quand j’écrivais, j’ai eu des moments euphoriques. Mais j’ai aussi eu des moments très rébarbatifs qui ne me donnaient plus envie d’écrire, parce que c’est pénible et cela tord les méninges. Si bien que lorsque j’ai remis le manuscrit à l’éditeur, je ne voulais plus en entendre parler. Mais depuis que le livre est sorti de l’imprimerie, j’ai commencé à lire quelques chapitres et j’ai pris du plaisir. Finalement, j’ai constaté qu’il y a des passages où j’ai renvoyé le lecteur à la suite, donc au prochain volume, comme l’avait d’ailleurs conseillé mon éditeur. Parce que le livre au départ était parti pour être plus volumineux au point où mon public cible ne pouvait plus y avoir accès.

Comme je vous l’ai indiqué tantôt, j’ai remis le livre à l’éditeur en août 2010. Et je me suis fixé pour discipline de ne pas l’actualiser depuis cette date, il y a de cela bientôt un an. Vous savez que l’actualité camerounaise et africaine s’est beaucoup enrichie depuis cette période. Vous comprenez qu’il y a de la matière pour le second volume. C’est d’ailleurs dans l’ère du temps avec la sortie de ce livre de son Eminence le Cardinal Chistian Tumi et de celui de Joseph Antoine Bell.


Propos recueillis par David Nouwou

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