Législatives et Municipales 2013. Affrontement sanglant entre gendarmes et militants du Rdpc

Joseph Flavien KANKEU | Le Messager Lundi le 21 Octobre 2013 Société Imprimer Envoyer cet article à Nous suivre sur facebook Nous suivre sur twitter Revoir un Programme TV Grille des Programmes TV Où Vendre Où Danser Où Dormir au Cameroun
Les populations de 13 villages de cet arrondissement situé dans le département du Haut-Nyong, toutes militantes du Rassemblement démocratique du peuple camerounais (Rdpc), voulaient protester contre l’élection de Frédéric Fouda Fouda comme maire de la commune de Mboma.

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Mais des hommes en tenue se sont interposés. Bilan : plusieurs blessés dont un grave en soins intensifs à Bertoua. Le maire sortant toujours porté-disparu. A l’heure qu’il est, 17 personnes se trouvent encore en garde à vue à la brigade de gendarmerie d’Abong-Mbang. Ces hommes et femmes ont été interpellés mercredi soir à Mboma et dans quelques villages environnants. Il leur est reproché d’avoir érigé des barricades sur la voie publique pour empêcher la tenue dans la salle des actes de l’hôtel de ville de Mboma, de la session de plein droit, et d’avoir organisé des manifestions sans autorisation préalable de l’autorité préfectorale. Une trentaine d’autres personnes interpellées ce même mercredi ont été libérées sous caution, et devront être déférées au parquet cet après-midi. Parmi elles, sept des onze conseillers municipaux restés fidèles au maire sortant. Jusqu’à ce jour, les riverains continuent de passer des nuits entières dans la broussaille parce que fuyant les gendarmes qui patrouillent jours et nuits dans les 13 villages qui constituent l’arrondissement de Mboma. Pour mieux comprendre la genèse de cette affaire, il faut remontrer au mardi 15 octobre 2013. « Ce jour-là, les conseillers se sont réunis à la sous-préfecture de Mboma pour une réunion de consensus. Ils ont choisi la sous-préfecture parce que ceux proches de Fouda Fouda estimaient qu’il y’a des fétiches posés à la mairie. Comme on n’a pas pu trouver de consensus, le mandataire du Comité central du Rdpc a demandé de voter comme le recommande la circulaire. Mais il n’y avait ni urnes, ni bulletins de vote, ni isoloir. Il y a eu une mascarade d’élection et Fouda Fouda s’est autoproclamé maire disant avoir été élu par 14 voix contre 11. C’est lorsqu’il criait victoire que les populations ont été informées et ont décidé de s’opposer à cette mascarade. C’est comme cela que le mouvement a commencé », se remémore Paul Ekoatsio, le secrétaire particulier de François Menkoe Ngono, maire sortant. Elle dit être encore traumatisée par la bastonnade que lui ont donnée des gendarmes. La même source indique que Jean Claude Zé le frère cadet du maire sortant est sous soins intensifs dans un centre hospitalier de Bertoua.

Coups de matraque

« Au cours de leur descente punitive, les gendarmes ont attaqué la résidence du maire, cassant les portes et emportant argent, liqueur, ordinateur portable. Par la suite, ils se sont livrés au pillage de la Société agricole Doria appartenant à un Français travaillant en partenariat avec la mairie. Là, ils ont emporté des sacs d’engrais, des pulvérisateurs et des machettes. Par la suite, ils ont détruit le snack-bar de Mme le maire, emportant la somme de 300.000 francs en espèces et des bouteilles de liqueur », ajoute un autre collaborateur du maire sortant, qui n’hésite pas à brandir son bras droit sur lequel l’on peut apercevoir des traces de coups de matraque.

Ici, le principal reproche formulé contre Frédéric Fouda Fouda remonte à l’année 2004, alors qu’il était député à l’Assemblée nationale. « Cette année-là, il avait collecté à chacun des habitants des 13 villages de l’arrondissement de Mboma en âge de voter et n’ayant pas de carte nationale d’identité la somme de 1000 Fcfa, prétendant vouloir la compléter pour faire établir cette pièce qui coûtait à l’époque 2500 Fcfa. Mais jusqu’aujourd’hui, nous n’avons reçu ni les cartes nationales d’identité, ni notre argent. De surcroit, il n’a rien fait pour notre département lorsqu’il était député de la nation entre 2002 et 2007 », dénonce un autre riverain solidaire au maire sortant.

Arguments de défense

A la brigade de gendarmerie d’Abong-Mbang où le reporter du Messager s’est rendu samedi dernier, toutes ces allégations sont balayées du revers de la main. « Nous sommes habitués à de telles accusations mensongères. Ce que je sais c’est que nous avons reçu l’instruction de Yaoundé de faire une descente musclée sur Mboma et d’interpeller toutes les personnes et toute chose susceptibles de troubler l’ordre social. Nous étions un peu plus de 50 gendarmes. Et une fois sur place, nous nous sommes rendu compte que des gens avaient barricadé les routes avec des tronçons d’arbres. Comme les instructions étaient fermes, nous avons fait notre travail. Rafler, c’est interpeller de force, bastonner et jeter dans le camion », explique un homme en tenue qui requiert l’anonymat pour des raisons évidentes.

Il souligne que deux tronçonneuses ont été emportées, des machettes et quelques objets dangereux aussi. « Les populations nous accusent alors que ce sont elles qui se sont attaquées à l’école maternelle du coin, déchirant le drapeau tricolore et pillant les bureaux. Nous avons fait une intrusion chez madame le maire, et avons emporté tout ce qui pouvait nuire à l’ordre public. Deux tronçonneuses ayant par exemple servi à couper les arbres pour barricader les routes ont été emportées et seront présentées sous scellée au procureur comme pièces à conviction. Qu’elle remercie Dieu de n’avoir pas été là à notre arrivée. Parce qu’elle aurait regretté ce jour-là tout le restant de sa vie », poursuit notre source dans les couloirs de la gendarmerie d’Abong-Mbang.

Frédéric Fouda Fouda le maire entrant, se dit plutôt scandalisé par l’attitude de son prédécesseur à la tête de l’exécutif communal de Mboma. « Personnellement, je ne comprends pas les raisons qui la motivent à créer la rébellion. Tout remonte du temps des investitures. Je m’étais proposé comme tête de liste. Elle s’y est catégoriquement opposée. Et finalement, on a trouvé un consensus selon lequel elle serait tête de liste mais que j’aurais avec moi dans la liste 14 des 25 conseillers municipaux. Cela a été arrêté ainsi. Mais mardi 15 octobre dernier, alors qu’on était à la réunion, on n’a pas pu trouver le consensus et le mandataire du Comité central a demandé qu’on passe au vote comme le veut la circulaire du président national. Et à l’issue des élections auxquelles elle a pris part, j’ai eu 14 voix contre 11. Cela signifie que mes 14 conseillers me sont restés fidèles de même que les siens lui sont restés fidèles. Mais juste après, elle a ameuté les populations pour manifester au village », regrette cet ancien député à l’Assemblée nationale du Cameroun, qui dit avoir personnellement joint au téléphone le secrétaire d’Etat à la défense chargé de la gendarmerie, Jean Baptiste Bokam, de qui les instructions données aux gendarmes seraient venues.

Escroquerie

Concernant l’accusation d’escroquerie, Fouda Fouda dit avoir certes collecté de l’argent auprès des populations, mais rassure avoir accompli la tâche pour laquelle ces fonds étaient destinés. « J’avais collecté 1500 Fcfa par citoyen au lieu de 1000 Fcfa comme ils le disent. Et j’ai complété de ma poche 1000 francs par personne pour faire établir des cartes nationales d’identité qui ont même d’ailleurs été dénommés cartes merci Fouda », ajoute le maire entrant. A l’allure où vont les choses, ce feuilleton ne fait que commencer, car la maire sortante est attendue à la brigade d’Abong-Mbang ce lundi après midi pour être auditionnée. Nous y reviendrons.

Focal. Le Rdpc en lambeaux ?

Le Rassemblement démocratique du peuple camerounais (Rdpc) survivra-t-il à cette année électorale ? Cette question lancinante est sur toutes les lèvres. Car après les frustrations des élections sénatoriales et les investitures à tête chercheuse ayant précédé le double scrutin législatif et municipal du 30 septembre dernier, de nombreux observateurs avertis de la scène politique camerounaise s’accordent à dire que le mal est désormais profond au sein du parti au pouvoir.

A Mbalmayo, des militants de base ont bravé les forces de l’ordre pour protester contre l’investiture d’une liste non consensuelle. A Yabassi, faute de manifester publiquement, les électeurs ont fait une démonstration de force au parti de Paul Biya, en votant massivement pour l’Ufp. Dans le Nyong Ekélé, l’Union des populations du Cameroun (Upc) a damé le pion au Rdpc, arrachant mairies et sièges à l’Assemblée nationale. Sans les tripatouillages d’Elecam, le Mouvement pour la renaissance du Cameroun (Mrc) aurait gagné la mairie de Yaoundé II et même un siège de député dans le Mfoundi. Le Rdpc qui gouverne depuis déjà 31 ans sans partage est ainsi en train de vivre une décadence spectaculaire. Présage d’une fin de règne ?

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