Cameroun - Consommation. Cameroun - Delor Magellan Kamgaing: Un homme engagé pour les droits des consommateurs

Alain NOAH AWANA & Souley ONOHIOLO | Le Messager Samedi le 26 Avril 2014 Société Imprimer Envoyer cet article à Nous suivre sur facebook Nous suivre sur twitter Revoir un Programme TV Grille des Programmes TV Où Vendre Où Danser Où Dormir au Cameroun
Depuis une dizaine d’années, cet homme est régulièrement au-devant de la scène pour dénoncer les cas de violation des droits des consommateurs. Portrait d’un personnage controversé, parfois mal compris, et qui ne s’attire pas que de la sympathie.

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Depuis une dizaine d’années, cet homme est régulièrement au-devant de la scène pour dénoncer les cas de violation des droits des consommateurs. Portrait d’un personnage controversé, parfois mal compris, et qui ne s’attire pas que de la sympathie.

« Comme Jésus s’est sacrifié pour son peuple, moi aussi, avec ma Bible à la main, je vais me sacrifier pour les consommateurs… » Ces propos sont tenus au lendemain de la Pâques qui s’est célébrée dimanche 20 avril 2014. Delor Magellan Kamgaing Kamseu est en effet entré en grève de la faim depuis lundi 21 avril, au siège de l’Agence de régulation du secteur de l’électricité (Arsel), pour contester le projet en cours qui prévoit la hausse du coût du kilowatt d’électricité au Cameroun. Quatre jours après le début de cette action, l’homme tient bon ; mais surtout, ne compte pas lâcher prise face à une décision qu’il qualifie d’«inique et cynique ».

Comme à son habitude, le président de la Ligue camerounaise des consommateurs (Lcc), une organisation qu’il a fondée en 2002 et qui milite pour la protection des droits des consommateurs camerounais, est serein et reste déterminé à aller jusqu’au bout de son sit-in. La résistance dont il fait preuve jusqu’ici vient rabattre le caquet à certains qui pensaient au départ qu’il ne tiendrait pas plus de deux jours. En tout cas, c’est mal connaître le caractère va-en-guerre de ce Capricorne né le 13 janvier 1975 à Penja, dans le département du Moungo.


Boulimique

Certains l’ont souvent présenté comme un personnage loufoque, à juste titre au regard de certaines de ses interventions publiques, autant dans les médias qu’au cours des réunions auxquelles il est convié. Mais, il n’en démord pas. « C’est comme ça que je suis et je ne changerai pour rien au monde (…) Il faut que les gens apprennent à parler avec franchise dans ce pays (…) Nous devons décrier tout ce qui est mauvais… », aime-t-il souvent déclarer. Sa verve est tellement violente, parfois, qu’il ne passe plus inaperçu auprès des autorités publiques du pays, et d’autres instances tant privées qu’internationales. Mais, le grand créneau de cet autodidacte qui a fait ses débuts dans la presse dans Le Messager des jeunes, c’est la protection du consommateur. Il existe plusieurs organisations de défense des droits des consommateurs au Cameroun, mais la Lcc a réussi à se hisser au rang de chef de file. Intervenant partout, ne loupant aucune occasion pour marquer son désaccord avec une quelconque décision, la Ligue a réussi à s’imposer dans les cercles de décisions. Delor Magellan Kamgaing Kamseu est régulièrement invité aux concertations entre le ministre du Commerce et les opérateurs économiques quand il s’agit de fixer les prix des produits de consommation de masse. Le rôle joué auprès des consommateurs a fait de lui un des administrateurs de l’Agence de la norme et de la qualité (Anor). Mais, il ne s’agit pas que de représentation. Boulimique, hyperactif, il compte à son actif de nombreuses actions qui, parfois, ont abouti à des fins heureuses pour les consommateurs.


Controversé

L’une des plus récentes et retentissantes victoires est le retrait d’une taxe sanitaire imposée par le ministre de la Santé publique sur le riz à l’importation en début d’année. La dénonciation, qui a fait des choux gras dans la presse, a poussé André Mama Fouda à se rétracter. Delor Magellan est partout : poisson, savon, huiles végétales, ciment, sucre, sel, eau, électricité, télécommunications, etc. Difficile de rencontrer une entreprise de grosse envergure faisant dans le commerce des biens et des services et qui n’a pas déjà eu maille à partir avec la Lcc.

Mais, il s’agit également d’un personnage parfois controversé. Certains de ses détracteurs disent, avec un brin de mauvaise foi, que son activisme est un tremplin qui lui permettrait d’avoir quelques prébendes auprès des institutions et entreprises qu’il indexe du doigt. Ils citent souvent l’exemple d’Aes-Sonel qu’il conteste justement aujourd’hui, après être tombé en disgrâce auprès du top management de l’entreprise, après avoir été pendant plusieurs années associé à leur campagne de sensibilisation des populations. Quoi qu’il en soit, s’il s’avérait que Delor Magellan Kamgaing Kamseu est un personnage aux multiples facettes, il n’en demeure pas moins que la grève de la faim engagée sonne comme une leçon aux Camerounais. D’ailleurs, des dizaines parmi eux se mobilisent de plus en plus pour l’accompagner et le soutenir. A l’instar d’un groupe de jeunes journalistes qui seront avec lui ce week-end…

Alain NOAH AWANA



Indignation: L’appel contre l’intolérable

Après cinq jours de surpassement de soi, d’holocauste personnel, de révolte et du mécontentement sur l’insoutenable hausse annoncée du prix de l’électricité, la grève de la faim du président de la Ligue camerounaise des consommateurs à l’Agence de régulation du secteur de l’électricité (Arsel), brise les tabous sociologiques et en appelle à la mobilisation générale tous azimuts.

Il est un peu plus de 12 heures 45 minutes hier, au quartier Bastos, à la lisière du portail où sont logés les locaux de l’Agence de régulation du secteur de l’électricité (Arsel). Couché sur le dos, Delor Magellan Kamgaing, d’apparence pas tout à fait athlétique dans ses bons jours, a perdu son aplomb. Sur son abdomen, un livre, la Sainte Bible. Pour cette autre journée de sa grève de la faim, le président de la Ligue camerounaise des consommateurs (Lcc) se nourrira du repas spirituel. Amaigri et très affaibli, le gréviste garde son humour habituel. « Le sous-préfet de Yaoundé 1er est venu me voir ; au lieu de m’aider à percer définitivement l’abcès, il m’a invité à faire attention car les multinationales selon lui, sont des forces très puissantes. Il s’est dit stupéfait et médusé en apprenant que je suis décidé d’aller jusqu’à ce que mort s’en suive, si la question de la hausse du prix que je combats, n’est pas réglée. Le délégué régional de la sûreté nationale pour le Centre a fait une apparition, une escale de quelques minutes et il a constaté ma détermination », affirme avec beaucoup d’emphase, le gréviste.

Plus grave, alors que le gréviste se répand en explications sur les raisons de sa démarche, l’on voit passer le Dg de l’Arsel. Des sources renseignent qu’il est en route pour une conférence de presse en ville. Les vitres de son véhicule bien montées, le principal occupant des lieux n’est pas soucieux de savoir que devant sa cour, il y a des gens qui posent des revendications sociales et humaines qu’il refuse d’entendre. Même qu’il y a quelqu’un qui, tel un écorché vif, est en train de se sacrifier pour une bonne cause ; collective. Dans un pays où, les pouvoirs publics et l’administration rusent jusqu’à l’âme, des complaintes et les misères du peuple, dans une nation où le peuple spectateur est traité de passif et considéré comme une masse d’idiots, le combat solitaire par l’action du président de la Lcc a cessé d’être un banal acte isolé de complaisance ; moins encore une offensive d’opportuniste.


Les braises

Cinq jours durant, alors qu’un Camerounais affronte la mort par une privation des choses vitales, le gouvernement camerounais et toute son administration jouent à l’indifférence et à la méprise dans un mutisme suspect. Aucune trace sur le terrain ; ni du ministre de la Communication Issa Tchiroma Bakary, ni celle de Catherine Bakang Mbock (ministre des Affaires sociales), encore moins la silhouette du ministre de l’Eau et de l’énergie, Basile Atangana Kouna. Dans leurs bureaux climatisés, ils semblent tous dire : « qu’il crève de faim, s’il en a convenance ». Et l’opposition alors ; aucune sirène de ces derniers qui devaient s’approprier la lutte ; poursuivre la révolte de la Ligue camerounaises des consommateurs. Ils sont invisibles sur les terrains, inactifs et sourds aux appels du peuple. Chant du cygne ou simple crépuscule des« crapules » ? L’indignation de Delor Magellan Kamgaing invite les populations camerounaises à la résistance. Il s’agit, pour chacun, de se rebeller contre le stress permanent d’un régime économiquement « constipé », socialement instable, politiquement désagrégé et culturellement désincarné.

Au-delà du ras-le-bol qui se ressent par l’action du président de la Ligue, en plus de la nécessité qu’il y a à acculer les pouvoirs publics jusqu’à leur dernier retranchement, il faut garder allumées les braises de la contestation ; passer à une nouvelle offensive. Lasses d’affronter en permanence les délestages sans cesse, les coupures intempestives d’eau et d’énergie électrique ; des routes mal construites (et qui sont pour la plupart des bourbiers), mécontentes contre l’arrogance, les abus divers et les promesses non tenues de l’octogénaire fils de Mvomeka’a, mêmes si les populations piaffent d’impatience, grondent de colère et d’indignation dans le silence, l’holocauste de Delor Magellan Kamgaing suggère une transhumance. Une seule hirondelle ne fait pas le printemps. Certes. Mais, elle peut suggérer la création d’une nouvelle société, tintée d’une nouvelle exigence de gouvernabilité.

Souley ONOHIOLO 

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