Opération Epervier. Etoudi: le plan anti Marafa

François Bambou | La Nouvelle Expression Jeudi le 14 Juin 2012 Société Imprimer Envoyer cet article à Nous suivre sur facebook Nous suivre sur twitter Revoir un Programme TV Grille des Programmes TV Où Vendre Où Danser Où Dormir au Cameroun
Pour étouffer l’écho des révélations de Marafa Hamidou Yaya, les collaborateurs du chef de l’Etat ont monté une stratégie à deux volets : nommer une personnalité consensuelle de sa zone à un grand poste, et détruire son image par des campagnes de presse.

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A force de feindre la sérénité, le régime révèle plutôt une panique dans la gestion des révélations de Marafa et de ses effets sur l’opinion. Incapable d’anticiper sur les thèmes à traiter par le célèbre pensionnaire de la toute nouvelle prison secondaire créé à la gendarmerie nationale de Yaoundé, les hommes du régime ont pris la résolution de monter une mécanique anti Marafa, dans le but de gommer ses traces dans son Nord natal. Un calcul ethno politique qui avait été opéré à l’époque pour mettre fin à la force politique de Titus Edzoa en pays Ewondo, en nommant un autre fils du terroir au gouvernement.

Ici, la question consiste à redistribuer les positions politiques dans la principale zone d’influence de l’ex SGPR car manifestement les hommes des Biya dans la zone n’ont rien pu faire contre la popularité de Marafa Hamidou Yaya dans sa région. Les efforts coalisés d’Alim Hayatou le secrétaire d’Etat à la Santé (et Lamido de Garoua à ses heures perdues) d’Issa Tchiroma et autres Yaou Aissatou n’ont guère porté. Au tour du chef de l’Etat, l’accueil triomphal réservé à Marafa à Garoua après son limogeage du gouvernement, le boycott de la cérémonie d’installation du gouverneur du Nord par les militants du parti présidentiel en signe de protestation contre l’arrestation de l’ancien Minadt, tout comme les échauffourées publiques entre pro et anti Marafa du parti observées à Garoua, ont achevé de convaincre que qu’au-delà de l’opinion nationale qu’il faut persuader de la culpabilité de l’homme, le plus dur sera de trouver un remplaçant politique à ce dernier au Nord.

En effet, pour donner tout l’élan nécessaire à l’ambition présidentielle qu’on lui prêtait et qui causerait aujourd’hui sa déchéance, Mafara a eu coutume de choyer la base du parti, de bâtir ainsi sa popularité dans la région et de montrer un leadership incontesté. L’idée au sein du sérail est donc de trouver un homme capable d’atteindre rapidement sa stature politique pour être à la hauteur de cet héritage.

Il est donc fort probable qu’un «digne fils du nord» soit prochainement propulsé à un poste de responsabilité de premier plan. Mais qui donc ? C’est le casse-tête que doivent résoudre les proches collaborateurs du chef de l’Etat. Faut-il pêcher dans les troupes de Marafa, au risque de mécontenter les Biyaistes fidèles qui y verraient une prime à la félonie ? Faut-il au contraire promouvoir les adversaires du truculent prisonnier au risque d’aggraver la « rébellion » ? Toutes les hypothèses sont sur la table.

Selon notre confrère l’œil du sahel qui vit son printemps depuis l’éclatement de cette affaire finalement embarrassante pour tout le sérail, des consultations ont même déjà commencé auprès des dignitaires du grand nord. Il y a peu de chances, croit savoir le tabloïd de Guibaï Gatama, que des anciens tels que Alim Hayatou bénéficient d’une promotion. Issa Tchiroma président du fantomatique Front national pour le salut du Cameroun (Fnsc) n’est pas non plus dans les petits papiers du président pour ce casting d’urgence. Car la priorité consiste à consolider RDPC dans la zone et non pas aider un allié de circonstance à asseoir son influence. Quelques autres hauts fonctionnaires auraient bien pu être promus, mais il faut quelqu’un qui puisse être rapidement opérationnel notamment avec un poids financier important et une notoriété déjà assise.

Un pion inattendu

La situation pourrait plutôt profiter à un pion inattendu. Ainsi, révèle ce confrère, le ministre Secrétaire général de la présidence, Ferdinand Ngoh Ngoh, a reçu le 1ier juin dernier le Lamido de Rey Bouba, Aboubakary Abdoulaye, pour recueillir ses avis sur la gestion de cette crise, et surtout sur la personnalité qui pourrait être promue dans la région. Selon notre confrère, le Lamido de Rey Bouba «a suggéré au secrétaire général, pour la haute information du chef de l’Etat, la nomination de Bayero Fadil à un poste important.

Il n’a pas dit lequel, mais tout le monde a compris qu’il s’agit d’un grand ministère pour disposer des moyens afin de mener la bataille de Garoua». Le capitaine d’industrie, qui a beaucoup investi ces dernières années dans les médias, pourrait donc être le principal bénéficiaire de la déchirure entre Paul Biya et son poulain d’hier. Si cette hypothèse devait se vérifier, la cause ne serait pas gagnée pour autant. Car pour beaucoup au Nord, Fadil, richissime soutien du Rdpc dans la région, est néanmoins perçu comme le plus grand diviseur commun, par certains militants qui s’en prennent d’ailleurs au Lamido de Rey Bouba.

«Le lamido ferait mieux de s’occuper des problèmes de droits de l’homme qui ternissent l’image du département de Rey Bouba », s’emporte un militant cité par L’œil du sahel, soutenu par un autre qui assure que la nomination de Fadil accentuerait les divisions au sein du parti dans la région du Nord. Il est vrai que Marafa Hamidou Yaya et l’industriel Fadil sont « liés » par une inimitié aussi profonde que sincère et que la nomination de ce dernier pourrait être perçue comme la victoire d’un camp sur l’autre.

A Yaoundé, certains titres de la presse privée tentent de sauver ce qui peut l’être, de la réputation du régime, en s’employant à donner une image aussi dégradante que possible de l’ancien secrétaire général de la présidence. Tandis que dans les chaînes audiovisuelles privées, les réseaux d’amitié du Mincom sont mis à contribution.

Une stratégie appelée à monter en puissance. D’autant que, dans la stratégie de communication un peu brouillonne mise en place, et visant à décrédibiliser la parole de l’ex SGPR et à le tourner en dérision, un problème majeur vient d’apparaitre : la mise en cause de la crédibilité d’Issa Tchiroma Bakari, du principal porte-voix des anti Marafa. S’il s’avère que le ministre de la communication a effectivement joué au croquemort, en bâtissant sa fortune sur le cadavre des victimes du crash de la Camair, sa parole s’en trouverait fortement dévaluée.


 

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