Cameroun - Energie. Hydrocarbures : Quand l’Etat subventionne les plus… riches

Serge D. Bontsebe | Mutations Mercredi le 08 Février 2012 Société Imprimer Envoyer cet article à Nous suivre sur facebook Nous suivre sur twitter Revoir un Programme TV Grille des Programmes TV Où Vendre Où Danser Où Dormir au Cameroun
La Banque mondiale estime que les ménages aisés profitent de 80% de la stabilisation des prix à la pompe.

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«Par ailleurs, le gel des prix des produits pétroliers a surtout profité au segment le plus riche de la population.» Révélée par la 3ème édition des «cahiers économiques du Cameroun» édités par le bureau de la Banque mondiale au Cameroun et rendus publics hier, cette information est loin d’être banale. Elle apporte une clé de lecture supplémentaire et de taille, une lumière de plus sur le secteur des hydrocarbures au Cameroun. Elle va davantage relancer le débat autour de la subvention de l’Etat visant à stabiliser les prix des produits pétroliers à la pompe.

Jusqu’ici, ce sont les montants de ces allocations budgétaires qui faisaient débat. En 2011, et selon la Caisse nationale de stabilisation des prix des hydrocarbures (Csph), l’Etat a alloué 323 milliards de francs Cfa à l’effet de contenir la montée des prix du baril sur le marché mondial. Alors que les prévisions à cet égard étaient de 240 milliards FCfa. La même Csph annonce que l’allocation de cette année 2012 sera dans les mêmes proportions que celle de 2011. En 2010, elle n’était que de 145 milliards de francs Cfa. Si les prévisions de 2012 sont respectées, la hausse de l’année précédente sera donc consolidée. 323 milliards de francs Cfa, soit, pour l’année 2011, 2,6% du Produit intérieur brut (Pib), 14% du budget de l’Etat, et la plus importante enveloppe de la région selon la Banque mondiale, devant le Congo, le Tchad, la Guinée Equatoriale, la République centrafricaine et le Gabon.

Face à de besoins gigantesques dans les secteurs porteurs de croissance économique, certains experts n’ont pas manqué de fustiger la taille de ces allocations. Ces experts suggèrent un report de cette allocation vers le financement de projets susceptibles d’accroître le Produit intérieur brut du pays, et donc une annulation pure et simple de cette subvention. Avec la crise socio-politique qui a secoué le Nigéria voisin en tout début d’année 2012 à la suite de la suppression des 8 milliards de dollars Us consacrés à l’amortissement des prix des produits pétroliers, pas sûr que Yaoundé les écoute. D’autres suggèrent dès lors, la détaxation de ces produits, suivant le model américain. La structure des prix des produits pétroliers au Cameroun révèle en effet 22 postes d’indexation dont six Tva et une taxe spéciale de 162 francs Cfa prélevée sur chaque litre de carburant.

Double saignée

Mais en estimant que «le quintile supérieur des revenus profite de près de 80% des avantages tirés du gel des prix des carburants parce que les ménages riches consomment plus de produits pétroliers que les ménages pauvres, en particulier le diesel et l’essence», la Banque mondiale vient porter le débat sur la «moralité» même de cette subvention. Certes les ménages pauvres profitent amplement de cet amortissement des prix à la pompe. Mais les informations révélées sur ce sujet par la 3ème livraison de la publication de son bureau de Yaoundé (consacrée aussi à la question de l’emploi au Cameroun) sont claires: Ce ne sont pas ces ménages pauvres qui bénéficient le plus de cette subvention, contrairement à ce les pouvoirs publics ont toujours indiqué.

Ces ménages là ne profitent que de 20% de cette subvention. Les 80% de l’enveloppe profitant aux riches, qui sont les plus grands consommateurs d’essence et de diesel. Donc, sous le couvert de cette subvention, l’Etat reverserait 2,08% des richesses du pays aux…riches. Situation d’autant plus problématique que ceux de ces riches qui sont des fonctionnaires, font supporter à l’Etat, leurs factures de carburant. Grâce notamment aux fameux frais de carburant, qui occupent un poste important dans le budget de fonctionnement de l’Etat. Au final, pour les riches et singulièrement pour les fonctionnaires riches, l’Etat saigne deux fois.

 

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