Cameroun - Communication Cameroun - Climat social: Le gouverneur du Littoral menace la presse
La communication de Joseph Beti Assomo, jeudi 17 juillet 2014 dans son cabinet à Douala avait pour objectif d’interpeller les journalistes sur le traitement qu’ils font au sujet de la hausse des prix des hydrocarbures et du taxi.
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L’objet de la communication de jeudi 17 juillet 2014 du gouverneur de la région du Littoral, à son cabinet à Douala n’avait pas été précisé à l’avance. Mais des journalistes invités affirmaient avec certitude : «Le gouverneur va vous parler de l’augmentation des prix des hydrocarbures et des mots d’ordre de grève lancés par certains syndicats.» Ils ont deviné juste. Sa communication autour du «climat social» de la région était axée sur la décision gouvernementale de supprimer la subvention sur les prix des produits pétroliers et le gaz domestique, et le traitement que la presse en fait.
En relevant que «la suppression de la subvention sur les prix des hydrocarbures ne tardera pas à produire des effets induits sur le niveau de l’investissement public au profit des populations», l’autorité se dit interloqué. «C’est l’occasion pour moi de m’étonner et de déplorer face à ce qui s’écrit et se dit dans certains journaux, radios et chaînes de télévisions de notre région.» Joseph Beti Assomo affirme à l’adresse du parterre d’Hommes de média présents : «De manière ahurissante et choquante, on entend des appels au soulèvement, à la révolte et à la casse. Certaines radios et télévisions se réfugient derrière le beau prétexte des émissions interactives pour laisser libre cours aux épanchements des auditeurs et téléspectateurs qui déversent leur fiel sans façon…» Faudrait-il embrigader notre démocratie qui, dit-on dans le sérail, est si cher au chef de l’Etat ? Susurrent les journalistes, non moins interloqués. En tout cas, le gouverneur pense que «se refugier derrière les auditeurs et téléspectateurs invisibles n’est ni sain ni courageux.» Joseph Beti Assomo envoie une menace à peine voilée : «En cas de dérive, nul ne saurait se laver les mains ni échapper aux conséquences des appels lancés avec son concours, celui de son journal, sa radio ou sa télévision.»
«Flagornerie»
L’orateur sait que le Littoral est le poumon économique du pays, donc «a besoin de paix sociale pour que ses habitants travailleurs, tenaces dans l’effort et laborieux puissent vaquer normalement à leurs activités vitales, à la recherche licite du pain.» Et d’ajouter pour convaincre : «La région du Littoral a connu et souffert des troubles et atteintes à la paix sociale. Ceux qui avaient lancé des mots d’ordre à l’époque n’ont jamais apporté la moindre réparation au préjudice qu’ils ont causé à leurs concitoyens.» Le journaliste ne devrait plus accomplir l’essentiel de son travail qui est d’éduquer, de divertir, d’informer ? Le n° 1 de la région fait croire que sa «communication est un appel à la modération et l’équilibre dans le traitement des questions sociales de l’heure. Loin de nous l’idée de museler qui que ce soit. Nous voulons simplement que les uns et les autres soient davantage conscients de leurs responsabilités et des conséquences de ce qu’ils écrivent, disent, font dire ou laisse dire sans vérification ni précaution dans les médias.» Sur un ton à la fois bienveillant, paternaliste et autoritaire, il invite les médias «non au silence ou à la flagornerie, mais à l’équilibre, la mesure et la modération.» On se demande bien si la communication du gouverneur pourra changer la triste réalité de la hausse des prix des hydrocarbures, du taxi, du coût de vie de plus en plus asphyxiant et les frustrations de ceux qui en souffrent. Le citoyen moyen qui, à force d’avoir serré «la ceinture» depuis les années 90 se retrouve avec l’estomac au talon et des préoccupations de plus en plus drastiques. Ce qui dans certains esprits donnent libre-cours à l’insécurité ambiante.
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