Cameroun - Environnement Réserves forestières :Des espaces en danger
Les prélèvements abusifs des ressources naturelles mettent à mal l’écosystème de ces sites.
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A mesure que l’impact néfaste de l’action de l’homme sur les forêts continue de s’intensifier, des zones qui, autrefois, étaient recouvertes de forêts avec des clairières, deviennent des terres agricoles parsemées de forêts sporadiques. Les nouvelles limites de la réserve de Ngambouo (région de l’Ouest Cameroun), avant son transfert, en 2014, à la commune de Kouoptamo, démontrent le niveau de dégradation de cet espace. Selon l’étude menée par le Centre technique de la forêt communale (Ctfc) en mai 2013, la superficie initiale du massif forestier de Ngambouo était de 1.941 ha. Mais, à cause de l’action des populations, la limite a été réduite à 1.498 ha, avec 470 ha de zone habitée, 978 ha convertie en champs et 439 ha de forêt existante.
D’après Isiaka Nkouandou, ingénieur général des eaux et forêts, par ailleurs directeur de la division technique de l’Agence nationale d’appui pour le développement (Anafor), les réserves forestières ont pour vocation principale le développement de la flore. La coupe du bois de chauffe, la vente de certaines espèces floristiques et l’agriculture itinérante sur brûlis ne sont pas sans conséquences sur ces sites. La déforestation, qui est par exemple reconnue comme un problème majeur de conservation, entraine une surproduction de gaz carbonique (C02), l’un des principaux gaz à effet de serre responsables du réchauffement climatique. D’après les experts, l’émission de ces derniers doit être en deçà de 2°celsius.
En 2011, une autre étude du Ctfc, cette fois dans le périmètre de reboisement de Mayel Ibbé, à l’Extrême-Nord, révélait que l’exploitation illégale des arbres avait provoqué la disparition d’au-moins 90% de ce couvert végétal. Selon le spécialiste en environnement et en développement durable, Boniface Botna, «la difficulté d’obtenir le gaz domestique et la pauvreté des riverains de cette zone sont les facteurs favorables à la déforestation.». Les conséquences de la déforestation sont également perceptibles sur les cultures, la faune et le cycle des saisons. «Il fait déjà très chaud. Les saisons ne sont plus respectées», entend-on régulièrement.
Inondations
D’après Denis Omokolo, enseignant de biologie à l’Ecole normale supérieure (Ens) de Yaoundé I, même les changements graduels du climat, les flux de substances nutritives, l’extraction des ressources naturelles et la fragmentation de l’habitat peuvent aboutir à des changements radicaux et soudains du caractère d’un écosystème forestier, causant la perte de résilience (la capacité de régénération suite à des événements externes) due à la baisse de la biodiversité au niveau de l’écosystème. Certains riverains mal informés ou insouciants ignorent l’impact de la gestion durable de la flore, la faune et la santé. Les arbres, par exemple, absorbent, retiennent et libèrent l’eau progressivement.
Ce statut de filtre épargne les populations de la sécheresse et des catastrophes naturelles comme les inondations, mais aussi d’un excès de sédiments qui pollue les rivières. Selon les spécialistes, «cette pollution entraine des maladies d’origine hydrique comme le choléra et une diminution de la qualité et de la quantité d’eau potable». Pour apporter une solution à ce problème de gestion abusive des ressources forestières dans les réserves, le ministère des Forêts et de la Faune (Minfof) s’est appuyé sur le décret du 27 mars 2012 fixant les modalités d’exercice de certaines compétences transférées par l’Etat aux communes en matière de promotion des activités de reboisement dans les périmètres urbains et les réserves forestières concédées.
Dans la logique de la décentralisation, on note les plans d’aménagement, le transfert des réserves classées à certaines structures comme l’Anafor, la Faculté d’agronomie et des sciences agricoles (Fasa) de Dschang et la sensibilisation des riverains à l’utilisation de ce patrimoine. «Cette stratégie va permettre de ralentir les prélèvements abusifs», avance Baudelaire Kemajou, directeur du Ctfc. «La décentralisation des activités par le Minfof est la meilleure solution pour la gestion durable des forêts», conclue Isiaka Nkouandou.
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