Cameroun - Corruption. Cameroun - Brasseries du Cameroun: Comment André Siaka s'abreuvait

Mamouda Labaran | La Météo Mardi le 04 Février 2014 Société Imprimer Envoyer cet article à Nous suivre sur facebook Nous suivre sur twitter Revoir un Programme TV Grille des Programmes TV Où Vendre Où Danser Où Dormir au Cameroun
Au cœur des pirouettes managériales de la Direction de la Société des Brasseries du Cameroun (Sabc), sous André Siaka. En ordonnant un audit, l'actuel président-directeur général du groupe Castel en Afrique, Guy De Clercq, entend tirer au clair les années de gestion du polytechnicien camerounais.

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A la faveur du communiqué du successeur d'André Siaka, en date du 27 janvier dernier, ce qui pourrait désormais s'appeler «l'affaire Siaka» donne depuis, l'impression d'avoir déjà livré tous ses secrets. En effet, si Francis Batista prétend, dans son communiqué, que le bilan de la gestion de Siaka est élogieux, qu'il n'a jamais été question d'un audit sur la gestion de son prédécesseur, qu'est-ce qui pourrait alors justifier la correspondance que Guy De Clercq, président-directeur général du groupe Castel en Afrique, a adressée à André Siaka au sujet de la «mission Francis Batista au Cameroun»?

Dans cette lettre, justement, l'homme de Castel en Afrique ne passe pas quatre chemins pour signifier, à l'ancien administrateur-directeur général de la Sabc, les véritables raisons de la descente de Francis Batista au Cameroun. L’ancien Directeur général de la Brasserie Star, à Madagascar, devrait pour cela et tel que précisé dans le deuxième point de ladite correspondance, «procéder à un audit de l'organisation des Brasseries du Cameroun».

A ce titre, peut-on y lire, «il visitera toutes les usines, régions commerciales et filières de la Sabc, analysera l'organisation les directions fonctionnelles et, d'une manière générale, recherchera tous les facteurs pouvant améliorer la performance des structures opérationnelles et fonctionnelles. A l'issue de sa mission, Monsieur Batista devra rédiger un rapport à l'attention de la direction générale. Ce rapport sera bien entendu communiqué à la direction générale de Sabc. Nous vous remercions d'en informer vos collaborateurs. Nous vous prions d'agréer, cher Monsieur, l'expression de nos meilleures salutations».

Du coup, il est permis de penser que Guy De Clercq prône, à travers cet audit, un retour à l'orthodoxie au sein de cette société brassicole. Car, malgré le rigorisme de façade dont a fait montre André Siaka pendant ses années à la tête de la Sabc, la réalité est toute autre. Raison pour laquelle la mission de Francis Batista est, entre autres, d'effectuer le tour des usines des Brasseries du Cameroun pour avoir le cœur net sur l'utilisation des 65 milliards de FCFA débloqués dans le cadre du programme d'investissement triennal 2008-2011, destinés à la restructuration des sites de fabrication et à l'acquisition de matériels plus performants de production. En effet, avec la célébration de leur soixantenaire, les Brasseries du Cameroun s'étaient fixé un programme d'investissement triennal afin de renforcer son positionnement et la notoriété de leurs produits. Il n'est pas superflu de rappeler que ce programme d'investissement était censé prendre ancrage sur des choix stratégiques: la qualité des hommes; la qualité du système de gestion; la qualité de la production et la qualité des relations avec les communautés.

Il est en outre reproché à André Siaka de n'avoir pas pensé à mettre sur pied un système intégré de gestion, pour accroître la part de marché de la Sabc et ainsi défier toute concurrence (maîtrise des coûts, économies d'échelle, contrôle de la production, ajustement de la qualité-prix, etc.). De même qu'on l'accuse de n'avoir pas mis en place une comptabilité industrielle digne de ce nom. A titre illustratif, ce n'est qu'en 2009 qu'interviendra le système intégré de gestion dénommé Movex M3 du groupe Lawson. Si ce n'était pour occulter une incurie, pourquoi avoir attendu si longtemps pour doter cette grosse entreprise brassicole d'un système de management performant, qui constitue un outil de décision et de pilotage en temps réel, source de gains spectaculaires et d'avantages concurrentiels incontestables?

Violation de la réglementation

En réalité, confient nos sources, cet état de choses a donné une occasion de rêve, pour André Siaka et ses affidés, pour piller les caisses de l'entreprise. «Le système M3 est très exigeant et empêche le déversement des écritures si les opérations comportent des erreurs. A cause de la multiplicité des codes, toute erreur aurait été facilement détectée. C'est l'une des raisons pour lesquelles l'ancien administrateur-directeur général et certains dinosaures des Brasseries n'en voulaient pas. Au contraire, ils ont verrouillé le système en propulsant leurs hommes à des postes clés, des transporteurs-livreurs aux dépositaires en passant par les clients détaillants et autres prestataires», persifle, sous anonymat, un administrateur de la société.

De nombreux cadres évoquent, sous anonymat, l'état de déliquescence dans lequel André Siaka a plongé les Brasseries du Cameroun. Ils prennent en exemple le non renouvellement de bien des équipements, le déséquilibre criard dans le paiement des salaires des employés de même niveau... La preuve d'un autre dérapage managérial est plus palpable dans la violation de la réglementation des charges qualifiées d'exportation. Ici, l'on dénote dans la démarche prévaricatrice d'André Siaka, le délit de fraude douanière. Il n'y a qu'à voir comment: 7.647.271.800 FCFA, sortis des caisses des Brasseries pour régler les différentes amendes et autres infractions au niveau de la Douane, ont pris des chemins tortueux. Une version crédible indique à cet effet que si, au niveau de la Sabc, l'on soutient que cette importante somme avait bel et bien été débloquée, dans les livres comptables de la direction générale de la Douane, par contre, seuls quelque 484.452.000 FCFA ont été réceptionnés. Une différence de taille, qui amène à s'interroger sur la destination du costaud reliquat, et surtout, ses «heureux» bénéficiaires. Toujours est-il que l'audit commandé par les responsables du groupe Castel tient les coupables par le nez...

Une version complémentaire laisse dire qu'à la suite d’une mission de contrôle effectuée au mois de juin 2001 sur les produits fabriqués par les Brasseries du Cameroun sous les régimes de la Tva et des droits d'assise (Da) pour les exercices 1997/1998, 1998/1999, et 1999/2000, composée de Diyouckey Eugène Prosper, Ndogo Edjana Olivier, Nkendo Augustin et Siade Assobo Antoine, une plainte avait été adressée, le 13 mai 2013 au Ministre des Finances, faisant état de ce que les Brasseries du Cameroun étaient redevables envers le Trésor public d'une somme de 3.961.860.082 FCFA, hors pénalités. Rappelons qu'à l'issue dudit contrôle, trois infractions seront relevées: des exportations sans déclaration ayant entraîné des droits compromis de 1.187.930.644 FCFA; des violations de la réglementation des charges, qualifiées d'exportations sans déclaration pour les marchandises, d'une valeur de 16.600.000.000 de FCFA; des réimportations sans déclaration d'emballages pour une valeur totale de 7.647.271.800 ayant entraîné des droits compromis évalués à 3.258.381.438 FCFA. Soit un total compromis évalué à 47.446.312.082 FCFA. Seulement, sur instruction du Minfi de l'époque, les Brasseries du Cameroun ne vont payer que 484.452.000 FCFA pour la liquidation immédiate des droits compromis découlant de la première infraction; 242.252.000 FCFA représentant les amendes pour la première infraction 50%). Les deux autres infractions seront passées par pertes et profits. Ce qui donne une différence de 3.961.860.082 FCFA (4.446.312.082 - 484.452.000 FCFA), représentant le montant des droits restants dus par les Brasseries. Voilà la gouvernance version Siaka! De, quoi perdre son latin, avec autant de dérapages qui amènent à penser que l'ex-manager aura été tout, sauf un gestionnaire pointilleux: une incurie érigée en mode de gestion et une violation de la réglementation douanière. Pour tout dire, le règne de l'ancien administrateur-directeur général des Brasseries du Cameroun devrait finalement pousser à réfléchir, constituant à la fois un scandale, voire une insulte à tout un pays.

Nous y reviendrons. 

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