Une affaire « d’empoisonnement à l’eau » ravive la tension. Le gouvernement a prescrit une enquête. Sékouba Konaté, le président et patron du CNDD joue les pompiers. La directrice générale du principal hôpital de Conakry relevée de ses fonctions.

ADS

Almamia au centre de Conakry ce dimanche. Quelques militaires aux bérets rouges déambulent dans la rue. Des marchands ambulants proposent du café, des biscuits ou des produits électroniques aux passants. Des boutiques qui étaient fermées la veille ont repris de l’activité. Certains tenanciers disent vouloir se rattraper. La veille, en effet, la ville était comme morte. « Les gens se cachent chez eux. Il y en a même qui ont quitté Conakry pour se rendre dans les villages », témoignait un transporteur  samedi vers 10h.  Il était sur la route qui mène à l’hôpital universitaire de Donka. Un portrait  de Ceilou Dalen Diallo accroché à son rétroviseur. Subitement, il a appuyé sur le frein  et arraché de force le portrait qu’il reconnaît avoir  lui-même noué quelques jours plutôt pour participer à la campagne de son candidat. « S’ils voient ça, ils vont casser ma voiture », explique le taximan nerveux et anxieux à ses clients. Et ces derniers, tous des étrangers, de lui demander : « ils, c’est qui ? » Réponse : «  Ce sont les gens de Alpha Condé, les Malinké. Ils cassent les biens des Peuls, les gens de Diallo ». A Madina, quartier chaud où est situé le principal marché de la ville , des pierres et des fragments de pare brise sur la chaussée témoignaient samedi matin du passage des bandes. Les forces spéciales de sécurisation des élections accompagnées de l’armée étaient à leurs trousses toute la nuit.  A coup de gaz lacrymogène et de matraques, ils ont tenté de disperser les manifestants et casser les émeutes qui ont tendance à se généraliser.

 
Limogeage

 
 Les jeunes proches de Alpha Condé reprochent aux militants de l’Ufdg d’avoir distribué de l’eau minérale empoisonnée aux partisans du Rpg réunis au palais du peuple vendredi pour ce qui était supposé être le dernier meeting de campagne de Alpha Condé. Plusieurs militants mal en point ont été transportés dans des hôpitaux. Une centaine, selon le décompte des autorités sanitaires qui soulignent que les patients présentent tous les symptômes d’une intoxication. «  Mais, on ne peut pas encore parler d’empoisonnement. Nous avons fait des prélèvements. Nous allons l’analyser avec le soutien d’une expertise européenne », a expliqué un médecin à la presse. Les victimes disent avoir tous chuté après avoir consommé de l’eau minérale Coyah à eux servi sur le lieu du meeting par des hommes qu’ils ne pouvaient identifier. « Il m’a dit prend. C’est le cadeau d’Alpha Condé », se rappelle le jeune Moustapha couché dans une salle de soin de l’hôpital Donka qui a accueilli une quarantaine de cas. 71 autres cas ont été enregistrés à l’hôpital Ignas Deen l’autre grand centre hospitalier de Conakry. La présence militaire a été renforcée autour de cet établissement où les parents des victimes en pleurs affluent. Le ministre de la santé publique, ainsi que d’autres membre du gouvernement se sont rendu au chevet des malades. Le gouvernement a pris en charge les soins et prescrit «  une enquête rigoureuse ». La Directrice Générale de l’hôpital National Ignace Deen est la première victime de cette affaire coyah potentiellement révélatrice. Pr Fatouma Binta Diallo a été relevée de ses fonctions pour « négligence, irresponsabilité. » Il lui est précisément reproché d’avoir minimisé la gravité de la situation dans des propos tenus face à la presse et d’avoir fait montre de discrimination dans la prise en charge. Elle a été remplacé par celui qui était jusque là son adjoint, le Dr Moussa Kourouma . Pour la société qui produit l’eau minérale Coyah, réputé certifié ISO, il y a urgence. Les commerçants ont dû retirer le produit de la circulation dans certains quartiers de la ville. « Les populations disent que c’est une eau empoisonné », rapporte un vendeur qui a même cessé de distribuer les autres marques d’eau minérale qu’il avait en stock.

 
La tension  est telle que samedi soir, Sékouba Konaté le président de la transition, a pris son bâton de pèlerin pour se retrouver chacun des deux candidats à son domicile. Il a obtenu de Ceilou Dalein Diallo et d’Alpha Condé qu’ils lancent des appels au calme en direction de leurs militants. Message bien reçu. A la télévision nationale, ils se sont tous exprimés dans le sens souhaité par le président tout en se titillant. Sékouba Konaté a lui-même pris la parôle pour dire que les fauteurs de troubles seront sanctionnés. 

ADS