Cameroun - Politique. Paul Biya - Biens et avoirs : On ne déclare pas

Claude Tadjon | Le Jour Vendredi le 20 Mars 2015 Société Imprimer Envoyer cet article à Nous suivre sur facebook Nous suivre sur twitter Revoir un Programme TV Grille des Programmes TV Où Vendre Où Danser Où Dormir au Cameroun
Depuis 19 ans, dans l’indifférence du pouvoir législatif et du Rdpc, le chef de l’Etat bloque une disposition de la constitution sur le patrimoine, à laquelle il est assujetti.

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Cette conversation en marge d’un sommet Afrique-Union européenne en Libye en 2010 entre Paul Biya, Abdoulaye Wade alors président du Sénégal et Teodoro Obiang Nguema est restée mémorable : « Ils ne peuvent pas établir que j’ai une fortune », lâche le chef de l’Etat camerounais à ses homologues attentifs, avant d’ajouter, mi-agacé : « Mais franchement, nous avons des oppositions, ils inventent des choses, ils traduisent les chefs d’Etat devant les tribunaux étrangers. » Le Parquet de Paris venait en effet d’ouvrir une enquête préliminaire après le dépôt, par l’association dénommée « Union pour une diaspora active », d’une plainte contre le chef de l’Etat du Cameroun, « soupçonné de s’être constitué un important patrimoine en France financé par des détournements de fonds publics ».

 

Le cabinet civil de la présidence de la République avait bondi en rappelant que le chef de l’Etat « qui a fait de la rigueur et de la moralisation des comportements le socle de sa politique depuis son accession à la magistrature suprême, le 06 novembre 1982, ne dispose pas de patrimoine en France ou ailleurs. » Incidemment, la sortie du cabinet civil sonnait comme un démenti au journal français Le Canard enchaîné qui le 16 mars 1983, à peine Paul Biya devenu chef d’Etat, faisait parler de lui à propos de son patrimoine en évoquant deux acquisitions immobilières en France. Démenti aussi à L’Événement du jeudi, autre journal français, qui en mai 1997, chiffrait la fortune du président camerounais et de sa famille à plusieurs dizaines de millions d’euros.

 

 

 On n’en parlera plus jusqu’à ce qu’un classement publié en octobre 2014 sur le site www.richestlifestyle.com, hisse brutalement le président camerounais à la 5ème place des plus riches d’Afrique, avec une fortune évaluée 200 millions$ (environ 100 milliards FCfa), la tête du classement étant occupée par l’Angolais Eduardo Dos Santos, avec 20 milliards$. Mais le directeur de Forbes Afrique, Michel Lobè Ewané, à qui le classement avait initialement été attribué a vite démenti la paternité de ce hit parade. Le ministre de la Communication, Issa Tchiroma Bakary ajoutera que se sont « des contrevérités criardes » mais surtout que le classement ne repose sur « aucune méthodologie fiable ».

Contrairement à certains présidents africains souvent éclaboussés par des scandales financiers et une propension au clinquant, Paul Biya a la réputation d’un certain détachement. Mais qu’en est-il réellement ? Difficile de savoir. Les outils de la tracabilité de son patrimoine sont comme sciemment rendus inopérants. En effet, le chef de l’Etat qui  est la première personnalité assujettie à la déclaration des biens et avoirs prescrite par la constitution du Cameroun depuis 1996, soit 19 ans, tarde à rendre effective cette déclaration des biens réclamée à tue tête par les partenaires du Cameroun mais curieusement ignorée par le pouvoir législatif et le Rdpc. Une loi votée le 25 avril 2006 prévoit pourtant la création d’une Commission chargée de recevoir, d'exploiter et de conserver les déclarations.

 

Les membres doivent être nommés par décret du président de la République, pour un mandat de cinq ans. La loi précisait, au moment de son adoption en 2006, que les personnes assujetties, actuellement en fonction ou en cours de mandat, disposent, pour déclarer leurs biens et avoirs, d'un délai de quatre-vingt-dix (90) jours, dès le démarrage des activités de la Commission. Aucun démarrage n’est possible. Le président de la République n’a jamais nommés les membres de cette commission rendant, de fait, inapplicable la loi.

 

 

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