Cameroun - Politique. Abelaziz Mounde Njimbam répond à Guibaï Gaïtama au sujet de l'alternance au Cameroun

cameroun24.net Jeudi le 04 Juin 2020 Opinion Imprimer Envoyer cet article à Nous suivre sur facebook Nous suivre sur twitter Revoir un Programme TV Grille des Programmes TV Où Vendre Où Danser Où Dormir au Cameroun
Le journaliste Abelaziz Mounde Njimbam accuse son confrère de voir l'alternance au Cameroun son un prisme tribal en faisant allusion au Gandoura et la Chechia, une tenue très répandu chez les peuls dans le Nord du Cameroun. Ce à quoi Guibaï a répondu en disant que ce n'était pas que les nordistes qui s'habillaient de cette façon. Cameroun24 vous propose cet échange courtois entre deux collègues.

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MON FRÈRE GUIBAI GATAMA !
Ce n'est pas la gandoura du successeur de Paul Biya qui comptera mais ses idées et son action pour le Cameroun ...

J’ai lu ton rêve. Mais, tu le sais, les Français ont inventé, pour nous contrôler - ressources et êtres - et installer les « leurs-nôtres », l’axe Nord-sud pendant qu’ils construisaient, sous De Gaulle, les boulevards périphériques, autoroutes et désenclavaient totalement leur pays.

Tu peux donc imaginer, qu’à la place de ces sinistres concepts, ce que cela aurait produit dans notre triangle national. Imaginer, aussi, si cela avait été le produit de nos 6 plans quinquennaux, dont les deux derniers inachevés, on n’aurait pas ces tombereaux de misère. Ceux qui bordent les routes boueuses, poussiéreuses, cahoteuses, bourbiers de motos et de véhicules, fosses de latérite à Kolofata, Pitoa, Moutouroua, Doukoula comme à Bangourain, Nyangon, Minka, Lomie, Angosas, Poutkak, Nkometou...

Oui, notre pays, au lieu d’être obsédé par la chéchia du locataire d’Etoudi, la couleur de la gandoura du successeur de Paul Biya venu du Grand-Nord et issu de nos songes régionalistes, se serait concentré sur la qualité des politiques publiques, de la réduction de son déficit routier, d’infrastructures, partout sur le territoire : chaque Camerounais, tel un Français, aurait pris du plaisir à partir de Yaoundé par le moyen de transport de son choix pour voir du pays ; du beau pays.

Partir des abords de forêt luxuriante, le nez baigné de l’air de la chlorophylle pour côtoyer les paysages somptueux et lunaires des Rhumsiki. Partir des plaines chargées d’histoire de l’Adamaoua, antre des Tikar, fondateurs de royaumes dans les Grassfields, des gorges découpées à la serpe du temps de Kola près de Guider pour plonger les pieds dans le sable doré de Mouanko où les plages nimbées de tortues marines de Campo, de son nom ancestral Etembo. Imaginons...

Alors, au lieu d’ancrer davantage cette mentalité coloniale dans notre imaginaire, pourquoi celui qui aura la charge de notre pays ne serait-il pas tout simplement un CAMEROUNAIS ? Un fils de ce 237 comme disent les jeunes dont on se fichera de savoir si sa chéchia ou sa gandoura est celle d’un Peul ou d’un Bamileke, d'un Bassa ou d'un Bamoun, d'un Babouté ou d'un " Mbamois " tout court. Mais une chéchia coiffant un cerveau plein d’idées fortes, géniales, partagées et efficaces pour faire décoller enfin ce pays. Celui qui a pu faire s’envoler un Boeing acquis un temps d’espoir et qui peine désormais à donner des ailes à Camair-Co.

Pourquoi le prochain locataire d’Etoudi ne serait pas simplement celui qui rendra compte de ses actes aux citoyens. Celui qui fera le détail, au cours de conseils de ministres réguliers et de discours fréquents de sa gestion des fonds publics et qui aura déclaré ses biens comme le prescrivent l’article 66 de la Constitution, la loi d’avril 2006 et celle sur le Code de Bonne gouvernance et de Transparence dans la gestion des finances publiques, de juillet 2018. Une gestion qui n’a ni tribu mais de la vertu. Un management public qui n’a pas de région mais des actions. Une conduite des affaires publiques qui n’a pas d'ethnie mais de l’efficience.

Dans ces conditions, la presse parfois à gages ne sera pas commise à divertir l’opinion sur le village du président du nouveau parti du concurrent ethnique de Kamto, l’on ne sera plus au « cognage des têtes » entre Marafa et Yerima Aboubakary, l’on ne versera plus dans les soporifiques prédictions sur le Bassa Cabral, évoqué par le Mpodol, l’on ne nous bassinera plus avec les guerres intestines du Dja et Lobo entre Bulu décidés au Bia Bia, à un Biya après Biya, pour " garder les choses à la maison ", à spéculer sur la minorité ethnique de Sadi ou d’un Bamoun outsider...

On parlera comme au pays de De Gaulle, incubateur du funeste axe Nord-Sud, d’idées, de stratégies, de coalitions sur la base de programmes pour notre pays. Et moins d’un mémorandum pour chaque patelin, mais comme en Allemagne de solidarité entre les territoires. En fait, on redeviendra des êtres pensants, investissant leurs énergie et intelligence pour trouver le meilleur pour le Cameroun.

Parfois, cher frère, comme l’enfer pavé de bonnes intentions, nos rêves peuvent tourner au cauchemar. Et en se levant, on se cogne le pied et la tête au mur de notre rigide et inefficace culture politique ; de cette géopolitique camerounaise qui au lieu de fédérer, rassembler, suscite la course au pouvoir pour le terroir. Et pour cause ? Ils sont le reflet de décennies d’ancrage dans une culture du repli et du chacun pour soi où l’idée puissante de Nation a été travestie et corrompue par des intérêts particuliers, le tribalisme, le népotisme des familles et assimilées au pouvoir, la corruption, sport national et ses conséquences : des grumiers sur les routes et la poussière pour les populations, les évacuations et visites médicales en Suisse et en France pour les hautes personnalités et le choléra pour les enfants du Septentrion.

Ce pays, cher frère, sera grand davantage quand ton opinion ne seront pas celles d'un Nordiste et d'un Sudiste, d'un Anglophone ou d'un Francophone, d'un Bamou ou d'un Toupouri, Massa, Moundang, mais simplement de citoyens du Cameroun, d'Afrique. Quand aussi, la peine d'un pauvre de Makari sera la préoccupation de son frère de Batouri.

Parler et rêver du Cameroun d'après n'est donc pas de sonder la couleur de chéchia et de gandoura de celui qui remettra le Nord dans l'axe, mais du Camerounais qui remplacera les mortels axes lourds par ces autoroutes qui relieront Kousseri à l'extrême Nord à Kribi dans le Sud. De celui qui rendra le Sahel aussi vert que les prairies du parc national de Boubandjida.

A. Mounde Njimbam


La réponse de Guibaï Gaïtama

Mon cher ami Abdelaziz, j’ai rêvé d’un camerounais vêtu d’une gandoura et coiffé d’une chéchia. Est-il nordiste ? Est-il le fruit d’une alliance politique Nord-Sud ? Je ne l’ai pas dit, mais les alliances politiques ne sont pas interdites. Encore moins les ententes pour le partage ou la gestion du pouvoir. Proche de nous, au Nigeria, il y a bien un « gré à gré Nord-Sud » et le pays est aujourd’hui la première puissance économique d’Afrique. Le « Gré à Gré » n’est pas toujours source de médiocrité...
Aussi, moins que les idées, les projets d’autoroute, de construction de forages et autres, c’est d’abord le rapport des forces politiques, je peux même parler d’ententes souterraines, qui déterminent le résultat d’une élection présidentielle dans un pays comme le nôtre. Est-ce un problème ? Non. On ne peut être démocrate et refuser aux électeurs le droit de s’entendre et de s’organiser pour remporter une election ou diriger un pays, sauf à vouloir imposer aux uns et aux autres ses choix et ses priorités.
Les électeurs ont le sens de leur intérêt, ne leur manquons pas de respect en nous érigeant en directeur de leur conscience, en leur disant : « voici ce qui est bien pour vous; vous n’avez pas d’eau, un tel candidat construira pour vous des milliers de forages; vous n’avez pas de routes, cet autre construira des autoroutes pour vous... ». Tous les candidats le diront, chacun avec son talent. Mais ça ne marche pas comme ça, le politique n’est pas un prophète encore moins un Messie. Au discours mielleux, il faut inspirer confiance. La confiance est la clé. Autrement, Mon cher Abdelaziz, chacun sait ce qui est bien pour lui, chacun de nous sait ce qui est bien pour notre pays, le Cameroun.
Pour finir, j’ai rêvé d’un successeur vêtu d’une gandoura et coiffé d’une chéchia et qui devait certainement avoir à cœur le Cameroun, notre Cameroun à tous. S’il se trouvait là dans mon rêve, c’est, je suppose, qu’il avait bien remporté « l’élection âprement disputée », qu’il avait convaincu la majorité de l’électorat de son projet, qu’il leur avait inspiré confiance.
Maintenant si je devais lui souhaiter quelque chose, c’est qu’il se mette au travail pour le bien de notre pays.

Guibaï Gaïtama

 

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