Cameroun - Economie. Cicam : La bataille du pagne camerounais se joue dans son capital

cameroun24.net Jeudi le 04 Septembre 2025 Société Imprimer Envoyer cet article à Nous suivre sur facebook Nous suivre sur twitter Revoir un Programme TV Grille des Programmes TV Où Vendre Où Danser Où Dormir au Cameroun
L'avenir de la Cotonnière industrielle du Cameroun (Cicam), joyau industriel national à l'agonie, se joue actuellement dans d'âpres négociations entre ses principaux actionnaires.

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L'État, par le biais du ministère des Finances (Minfi), et la Société nationale des investissements (SNI) s'affrontent sur une reconfiguration drastique du capital, un bras de fer qui pourrait précipiter l'arrivée d'un repreneur stratégique indien.

Une créance étatique qui change la donne

Le cœur du conflit ? Un prêt de plus de trois milliards de FCFA accordé par l'État pour maintenir à flot l'entreprise. Face à l'incapacité persistante de la Cicam à rembourser, le Minfi propose une solution radicale : convertir cette dette en actions. Une manœuvre qui porterait la part de l'État à 85% du capital, réduisant la SNI, actionnaire historique majoritaire (75%), au rang de minoritaire (15%). Une perspective que la SNI refuse catégoriquement, bloquant pour l'instant tout consensus.

L'ombre portée d'Arise IIP

Ces discussions internes sont d'autant plus cruciales qu'elles se déroulent en parallèle de négociations avec le géant industriel indien Arise Integrated Industrial Platforms (Arise IIP). Le gouvernement camerounais plancherait depuis fin 2023 sur l'entrée du groupe au capital, avec un objectif affiché : céder environ 85% de l'usine. Mais Yaoundé, brûlé par les passifs de l'entreprise, entend garder au moins 30% du gâteau pour conserver un droit de regard sur les stratégies futures. Un arbitrage complexe qui devrait trouver son épilogue d'ici à la fin septembre.

Une survie artificielle et un paradoxe insupportable

Derrière ces jeux d'actionnariat se cache une réalité économique alarmante. La Cicam navigue en eaux troubles depuis plus de dix ans, au point que ses capitaux propres étaient tombés dans le négatif (-19 milliards FCFA), un seuil qui, selon le droit OHADA, aurait dû entraîner sa dissolution pure et simple.

Pour éviter le naufrage, une opération de sauvetage comptable a été orchestrée : une réévaluation de son patrimoine foncier et immobilier a artificiellement fait passer ses fonds propres à +24 milliards FCFA. Un coup de peinture qui masque mal une dette abyssale de 35 milliards FCFA qui étouffe sa trésorerie et paralyse ses investissements.

Le symbole le plus criant de ce déclin ? depuis quatre ans, la Cicam, censée incarner la souveraineté textile du Cameroun, est contrainte d'importer du tissu – y compris pour confectionner les pagnes de la Journée internationale de la femme du 8 mars. Un paradoxe qui résume à lui seul l'urgence d'un plan de sauvetage crédible.

Alors que les tractations s'accélèrent, tout le secteur textile camerounais retient son souffle. La relance de la Cicam est perçue comme le dernier rempart pour réduire la dépendance aux importations et ressusciter une filière coton qui fut jadis un fleuron de l'économie nationale. La bataille pour le contrôle de son capital est bien plus qu'un simple rapport de force actionnarial : c'est le combat pour la survie d'une industrie.
 


Cameroon's Cicam: A Battle for Control Over a Struggling Textile Giant

The future of the Industrial Cotton Company of Cameroon (Cicam), a national industrial jewel on the brink of collapse, is being determined in tense negotiations between its main shareholders. The State, through the Ministry of Finance (Minfi), and the National Investment Corporation (SNI) are locked in a power struggle over a drastic capital restructuring, a showdown that could pave the way for an Indian strategic investor.

A State Debt That Changes Everything

At the heart of the conflict is a loan of over 3 billion CFA francs granted by the state to keep the company afloat. Faced with Cicam's persistent inability to repay, the Minfi is proposing a radical solution: convert this debt into equity. This move would increase the state's share to 85% of the capital, reducing the SNI, the historical majority shareholder (75%), to a minority stake (15%). A prospect the SNI is fiercely resisting, currently blocking any consensus.

The Shadow of Arise IIP

These internal discussions are all the more crucial as they coincide with parallel negotiations with the Indian industrial giant Arise Integrated Industrial Platforms (Arise IIP). The Cameroonian government has reportedly been working since late 2023 on bringing the group into the company's capital, with a stated goal of selling about 85% of the mill. However, Yaoundé, wary of the company's liabilities, intends to keep at least 30% to maintain a say in future strategies. A complex arbitration expected to be concluded by the end of September.

An Artificial Survival and an Unbearable Paradox

Behind these ownership games lies an alarming economic reality. Cicam has been in dire straits for over a decade, to the point where its equity had turned negative (-19 billion FCFA), a threshold that under OHADA law should have triggered its outright dissolution.

To avoid sinking, an accounting rescue operation was orchestrated: a revaluation of its real estate and property assets artificially boosted its equity to +24 billion FCFA. A coat of paint that poorly masks an abysmal debt of 35 billion FCFA, which is suffocating its cash flow and paralyzing its investments.

The most glaring symbol of this decline? For four years, Cicam, meant to embody Cameroon's textile sovereignty, has been forced to import fabric – even to make the pagne for International Women's Day on March 8. A paradox that alone summarizes the urgency for a credible rescue plan.

As negotiations accelerate, the entire Cameroonian textile sector is holding its breath. Cicam's revival is seen as the last bastion to reduce dependence on imports and resurrect a once-flourishing national cotton industry. The battle for control of its capital is much more than a mere shareholder power play: it is a fight for the survival of an industry.
 

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Didier Cebas K.

 

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