Opération Epervier. Détournements présumés. La Cour suprême enquête sur Théodore Augustin Mbenoun

Gaby Nkot | Sans Détour Mardi le 18 Octobre 2016 Société Imprimer Envoyer cet article à Nous suivre sur facebook Nous suivre sur twitter Revoir un Programme TV Grille des Programmes TV Où Vendre Où Danser Où Dormir au Cameroun
Les auditions ont commencé depuis la semaine dernière dans ce scandale qui éclabousse le haut magistrat, du moment où il faisait office de président de la Chambre des comptes de la Cour suprême, pour des présumées exactions graves.

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C ’est sans doute un pas décisif que la plus haute juridiction vient de franchir dans sa détermination à faire la lumière sur les agissements du haut magistrat Théodore Augustin Mbénoun, suite à sa saisine le 30 juillet 2013 par les patriarches de la communauté Log Baning dans le département de la Sanaga-Maritime - région du Littoral.

Proche de l’accusation, on affirme que les auditions ont commencé le 13 octobre 2016, et devraient se poursuivre dans les jours qui viennent, par devant le président de la Chambre judiciaire de la Cour suprême, faisant office de juge d’instruction, la qualité du mis en cause obligeant. Selon toute vraisemblance, c’est en qualité de témoins que ces patriarches ou leurs mandataires, présumés victimes des exactions du magistrat Mbénoun, sont ou seront entendus, le ministère public ayant décidé de se joindre à la procédure pour poursuivre. Ce qui vient ajouter au soulagement de la défense des patriarches dont beaucoup sont aujourd’hui décédés ou invalides - leurs âges variant entre 70 et 84 ans à l’époque de la plainte, et qui sont relayés dans la procédure par leurs mandataires. Avec ce début des auditions, la haute juridiction donne plus de visibilité à l’ordonnance N°024 du magistrat Dagobert Bisseck qui avait fixé à 100 000 Fcfa, le 30 juillet 2016, le montant de la consignation à payer par les plaignants pour la mise en route de l’affaire. Formalité exécutée dans la foulée. Ce qui atteste de la détermination de la haute juridiction à tirer au clair les accusations portées contre le haut magistrat par les patriarches de sa propre communauté. en effet, selon la plainte avec constitution de partie civile de ces vieux, reçue au greffe de la Cour suprême sous le N°2058 le 30 juillet 2013, près d’une dizaine de patriarches Log Baning accuse le haut magistrat Théodore Augustin Mbénoun de « faits graves et divers, atteinte à la fortune de l’etat, entraves à la justice, trafic d’influence, complicité d’ enlèvement, séquestration et torture, complicité de pillage en bande organisée », avant de solliciter l’ouverture d’une information judicaire à son encontre.

Conseil supérieur de la magistrature

Difficile pour l’instant de présager de la suite à réserver à cette procédure, Théodore Augustin Mbénoun bénéficiant jusque-là de la présomption d’innocence. D’ailleurs, pour tempérer l’enthousiasme qui semble gagner le camp des plaignants, les juristes rappellent que les décisions du magistrat instructeur sont frappées du sceau de la confidentialité jusqu’à un éventuel renvoi devant la juridiction de jugement. C’est dire si la culpabilité ou non du magistrat Théodore Augustin Mbénoun est loin d’être établie.

Seulement, dans les coulisses de la justice, et particulièrement celles de la Cour suprême, l’espèce détone par sa spécificité.

Ce n’est pas tous les jours qu’on voit un magistrat, de surcroit hors hiérarchie, jugé par ses pairs. on se souvient que parallèlement à la requête des patriarches devant la Cour suprême, une autre plainte portant pratiquement sur les mêmes faits avait été adressée au Tcs - le Tribunal criminel spécial le même 30 juillet 2013, et enregistrée sous le N°000238, par les mêmes plaignants et contre le même accusé, avant d’être classée sans suite par l’exprocureur général près cette juridiction spécialisée. Répondant au président du Conseil des sages - doyen et patriarche de la communauté Log Baning – emile Nsoga écrivait : « J’ai l’honneur de porter à votre connaissance que votre plainte visée en référence, transmise à mon parquet (…) a été classée sans suite. Les faits y évoqués étant à la fois constitutifs de faute de gestion en ce qui concerne le fractionnement des marchés ; d’infraction à la réglementation forestière s’agissant de l’exploitation d’une forêt de la communauté, et enfin, d’absence d’indices avérés pour les autres éléments évoqués ».

en optant d’ouvrir une information judiciaire, la Cour suprême aurait-elle trouvé, contrairement au Tcs, que les indices dont s’agit seraient-il avérés ? en tout cas, la plainte des patriarches est étayée par une documentation impressionnante qui laisse ressortir de présumés détournements à travers des fractionnements de marchés, au profit de certains affidés présumés du mis en cause. un extrait de cette plainte relève que « la famille Mbénoun s’était spécialisée dans les marchés publics, que certains disaient fictifs, à travers la société Gamus de l’ex-épouse du magistrat ». Des détournements présumés que les auteurs du pamphlet contre le magistrat évaluent à environ 200 millions de Fcfa. Toujours dans la même plainte, peut-on lire que « les membres de cette association - Cercle des amis de la forêt dense, mise sur pied par la famille Mbénoun, et quelques uns de leurs affidés ont, en bande, du 12 au 22 septembre 2012, organisé le pillage et la coupe frauduleuse des bois dans la forêt de l’ex-Gic Nkobayeba, pour un coup de près d’un milliard de Fcfa ». Ces montants astronomiques qui cumulent à environ 1,2 milliard de Fcfa, auraient-ils décidé la Cour suprême à ouvrir cette information judiciaire dans le contexte ambiant de l’opération epervier qui, comme aime à le rappeler le chef de l’etat, ne devrait épargner personne, et qui a déjà conduit en prison un premier ministre, des secrétaires généraux de la présidence de la République, des ministres et autres gestionnaires de la fortune publique ? en tout cas, dans les coulisses de la justice, beaucoup de ses collègues n’excluent pas la possibilité pour le magistrat Théodore Augustin Mbénoun de démissionner de ses charges au cas où l’information judiciaire ouverte sur ces exactions venaient à déboucher sur le renvoi devant la juridiction de jugement, pour ne pas laisser prospérer la théorie d’un corporatisme négatif que d’aucuns pourraient développer autour de cette affaire. en attendant, et cela se susurre également dans les coulisses de l’espèce, en s’attaquant aux présumés détournements dans ses propres rangs, la Cour suprême, et partant la justice camerounaise, voudrait montrer à la face du monde que l’opération epervier n’est pas une justice des forts sur les faibles, ou encore, n’est pas une opération à têtes chercheuses, comme aiment bien le clamer certains de ses contradicteurs.

Reste que si cette détermination de la plus haute juridiction venait à s’affirmer dans toute sa rigueur, c’est l’avenir du haut magistrat sous le feu des accusations qui serait assombri. D’aucuns n’excluant pas la possibilité pour le Conseil supérieur de la magistrature, dont on attend la convocation, de se saisir à son tour du dossier, les poursuites judiciaires n’étant pas incompatibles avec les sanctions disciplinaires.

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