Cameroun - Musique. La musique camerounaise est-elle en crise ?
La question mérite d'être posée sérieusement quand on voit la nouvelle cuvée de chanteurs camerounais qui font le buzz en ce moment, non seulement au pays, mais aussi dans la diaspora.
Ils ont pour nom :
Nyangono du Sud, alias Lil Ngono, avec son tube Tout dans le ventre, Say m'y name ;
Grand Barack, alias Lil Barack, avec son titre, Rentre à la maison , L'amour c'est le miel ;
Joël Lafleur, qui chante Le bâton de manioc, avec ses 12 mengueuks (nœuds).
Les deux premiers se sont affublés du pseudonyme de Lil, probablement par référence à Lil Wayne, le célèbre rappeur américain. Ces trois chanteurs camerounais de nouvelle génération malgré leur âge avancé, ont une chose en commun avec l'illustre modèle américain, à savoir le buzz et l'engouement du public pour leur musique, mais la comparaison s'arrête là, parce que leur style est diamétralement aux antipodes.
Comme le dit Jean-Jacques Rousseau, la musique est l'art d'accommoder les sons de manière agréable à l'oreille. En écoutant nos fameux chanteurs, on a l'impression qu'ils font plutôt du bruit, qu'accompagnent leurs voix, discordantes, éraillées, criardes, désagréables à l'oreille. On se retrouve là face à la négation même de la chanson par des anti-modèles, des anti-stars.
Le plus étrange dans tout ceci est que ces faux chanteurs, ces anti-stars remportent un certain succès auprès du public. Les parodies de leurs tubes se multiplient. Ce qui est sûr c'est qu'en ces moments de conjoncture difficile, ils font rire, ils dérident, ils jouent le rôle d'anti-dépresseurs. On se surprend même parfois en train de chantonner toute la journée et avec le sourire leurs airs en apparence débiles.
Selon Joseph Comte de Maistre, " Toute nation a le gouvernement qu'elle mérite ". Nous sommes tentés de parodier cette assertion en disant : chaque peuple a les musiciens qu'il mérite. Mais méritons-nous vraiment cette nouvelle vague de chanteurs, qui ressemblent plutôt à des amuseurs publics ? Quand on considère les fleurons de la musique camerounaise qui ont fait leurs preuves à travers le monde tels que Richard Bona, Kareyce Fotso, Locko, Sergio Polo, Salatiel, Krys M, Many Bella, Sally Nyolo, Coco Argentée, Charlotte Dipanda, etc, pouvons-nous conclure que le niveau de notre musique est en chute libre et que notre culture musicale est en crise ?
Caroline Meva