Cameroun - Economie. Ces vendeurs d’illusions qui vous font miroiter un enrichissement facile

cameroun24.net Jeudi le 19 Avril 2018 Société Imprimer Envoyer cet article à Nous suivre sur facebook Nous suivre sur twitter Revoir un Programme TV Grille des Programmes TV Où Vendre Où Danser Où Dormir au Cameroun
Les faits. De plus en plus, ils s’installent sans autorisation, laissant sur le carreau quelques temps après, de nombreux citoyens. le qoutidien gouvernemental CT a enquêté

ADS



Depuis plusieurs mois, les habitants du quartier Ahala à Yaoundé, au lieu dit « Repos du chef », ont perdu le sommeil. Et pour cause. S’y est installée la Mission d’intégration et de développement pour l’Afrique (Mida).

De nombreuses personnes, hommes, femmes et jeunes avec ou sans emploi, s’y sont rendus en masse pour une inscription à la formation rémunérée offerte par cette institution qui dit faire dans le secourisme pour la prévention des crises civiles et militaires tel qu’annoncé par son logo. Pour cela, il faut débourser la modique somme de 12 500 F, et près de 13 000 F supplémentaires d’achat de documents de formation.

Après une semaine de formation, le postulant reçoit en retour 63 000 F. Pour le seul mois de février, 1 800 jeunes avaient été formés et auraient reçu plus de 2 milliards de F. L’histoire ne s’arrête pas là. La Mida offrant, par ce qu’on appelle le marketing de réseau, la possibilité à tout un chacun d’inscrire autant de personnes qu’il le désire et de gagner ainsi de l’argent au prorata du nombre de personnes inscrites, ce fut la ruée.

Obligeant les autorités administratives à -enfiny voir un peu plus clair. Premier constat, cette mission n’a aucune existence légale. Ses activités ne peuvent donc être autorisées. La pertinence même de leurs missions est sujette à caution. Convoqués par l’administration, les représentants de la Mida ne se sont pas présentés, obligeant cette dernière à instruire leur interpellation.

Les financements viendraient de partenaires extérieurs prétendant vouloir aider les jeunes, à lutter contre la délinquance, la pauvreté et le grand banditisme.

Le même procédé avait déjà été mis sur pied il y a quelques années pour les affaires Leadership Academy, Famm Cameroun, Fiffa et bien d’autres, qui avaient connu des dénouements malheureux, et laissé sur le carreau des milliers de compatriotes qui jusqu’aujourd’hui, n’ont toujours pas recouvré leur mise.

Voilà une nouvelle affaire qui vient défrayer la chronique du volet escroquerie, avec en toile de fond, un enrichissement facile et programmé des initiateurs. Reste une interrogation à laquelle il faudra bien répondre.

Comment une organisation comme celle là, a pu s’installer sans autorisation, mobiliser pendant des mois des milliers de jeunes, distribuer autant d’argent aux populations sans véritable effort de leur part au nez et à la barbe de l’administration ?

Les enquêtes en cours on l’espère, permettront de lever un pan de voile sur cette autre affaire de gros sous et relever les responsabilités des uns et des autres. Question d’envoyer, une fois pour toute, un véritable coup de semonce aux professionnels de l’enrichissement facile.

Alfred MVOGO BIYECK



Quand on veut gagner gros à tout prix


Le Contexte

La crédulité et le goût de la facilité constituent le terreau sur lequel se construisent ces sociétés écrans.

La « success story » de ces sociétés écrans qui font rêver certains Camerounais tient à des facteurs qui structurent le profil de leurs adhérents. On peut de prime abord s’interroger sur l’attentisme de certaines autorités qui constatent sur le tard, l’existence illégale de sctructures dangereuses.

L’interdiction par le préfet du Mfoundi de « l’Institut Mida et de prévention des crises civiles et militaires » sur toute l’étendue du département éponyme pour « existence illégale, usurpation de fonctions, corruption de la jeunesse, port illégal d’insignes et d’uniformes militaires, escroquerie par appel au public » intervient presque sept mois après le lancement des activités de cette structure qui, comme toutes les sociétés de même acabit, a apparu sporadiquement sur la scène publique. Mais son déploiement rapide et son rayonnement auprès de ses adhérents se nourrit beaucoup plus de la précarité ambiante.

On l’aura constaté, la plupart des adeptes de l’Institut Mida se recrutent essentiellement parmi les étudiants et autres personnes en quête d’emploi ou d’un avenir meilleur. Si l’on peut, dans une certaine mesure, comprendre l’attitude de ces catégories sociales par rapport à une organisation rompue dans le marketing de réseau, il est curieux de constater qu’une partie non négligeable des « victimes » de ces sociétés écrans est constituée « des personnes nanties » presque totalement à l’abri du besoin.

Certains ont vidé leurs comptes bancaires ou se sont endettés auprès des tontines et des établissements financiers pour venir faire des placements à hauts rendements. D’autres ont vendu maisons et voitures pour les mêmes raisons. Mues par l’appât du gain facile pour certains et poussés par la crédulité pour d’autres, ces catégories de « clients » découvrent sur le tard la supercherie de ces vendeurs d’argent magique.

Les griefs qui ont conduit les autorités publiques à interdire les activités de l’Institut Mida sont presque les mêmes que ceux reprochés à la Fondation pour l’Assistance Maladie et Maternité Cameroon (Famm Cam). Lancée en 2002, cette Ong présentée par sa promotrice d’alors comme une panacée à la sécurité sociale au Cameroun, a été assignée en 2007 devant les instances judicaires pour « usurpation de fonctions, détournement de deniers publics, refus de déclarer les impôts et refus de reverser les cotisations à la CNPS ».

Le montant des cotisations sociales collectées auprès de 2 800 employés de cette Ong a été évalué à 1,3 milliard de FCA. Quelques années avant, le feuilleton Leadership Academy dont les activités ont été interdites en octobre 2000 par le ministre de l’Economie et des Finances d’alors a fait des vagues. Soupçonnée d’être une société écran, cette institution d’épargne a été sommée de fermer ses portes.

Leadership Academy dont le principal promoteur était un expatrié, s’était vu refuser l’agrément par la Commission bancaire de l’Afrique centrale (Cobac) invitait les clients potentiels à lui confier leur épargne pour des intérêts mirobolants .

Grégoire DJARMAILA

 



« La recherche du gain facile justifie cet intérêt »

L'explication

*Dr Christian Bios Nelem, sociologue, chargé de cours au département de sociologie de l’Université de Yaoundé I.

Depuis quelques années, on assiste à la recrudescence des structures qui se sont spécialisées dans l’enrichissement à faibles coûts. Pourquoi un tel phénomène ?

Tout est parfois lié à la méconnaissance des activités et des missions de ces structures. On parle d’activités douteuses parce que l’on n’arrive pas à comprendre la traçabilité dans les placements sans avoir en retour un suivi et même une évaluation des projets réalisés. L’engouement est la conséquence d’un ensemble de problèmes observés par une société essentiellement capitaliste. Le gain ou la recherche de gain constitue davantage l’élément pouvant justifier ce type d’intérêt. De bouche-à-oreille, on va donc voir un certain nombre d’acteurs se trouver intéressés par une forme de placement d’argent donnant en retour suffisamment d’enthousiasme pour accumuler un capital financier.

Quelles sont les raisons de l’engouement populaire généralement observé ?

C’est la vulnérabilité, l’absence d’une aisance matérielle, le gap ou la fracture entre ceux qui possèdent et ceux qui ne possèdent pas. D’une certaine façon, c’est cette société capitaliste qui voudrait montrer qu’on se réalise quand on a suffisamment amassé. La misère conduit forcément certaines personnes à ce type de recours et à entreprendre la réalisation de soi au regard des possibilités et des facilités qui peuvent être offertes.

Toutefois, on retrouve parfois des personnes nanties au coeur du système…

En fait, le système permissif en place permet à ces grosses fortunes de s’y investir. Un tel système peut être un moyen pour blanchir leurs avoirs. Ceci au regard de l’absence en face d’un contrôle rigoureux de leur projet d’accumulation de biens et de richesses. De toutes les façons, on finit par comprendre que ces structures ouvrent leurs portes à tous. Le plus important reste le nombre de parts prises, non pas le profil des requérants. Aussi, on constate que ce ne sont pas forcément des personnes nanties. Mais plutôt des personnes qui vont se cacher derrière la misère ou le profil d’une personne sans emploi pour récolter en retour ce capital qu’ils auraient placé. Une contrepartie qui s’inscrit dans l’exploitation de la misère morale de certaines personnes en estimant que la voie de la réussite passe par la facilité et ce type de placement financier.

Yannick ZANGA
 

 


Soyons plus vigilants

Regard

La suspension des activités de l’Institut MIDA (Mission d’intégration et de développement pour l’Afrique) dans le département du Mfoundi servira- t-elle de leçons aux compatriotes qui courent une nouvelle fois le risque de se faire escroquer ?

On peut en douter, compte tenu de la facilité avec laquelle les promoteurs mobilisaient des foules compactes au quartier Ahala à Yaoundé. Nul ne peut nier le fait que de nombreux concitoyens, sans emplois, tirent le diable par la queue.

Ils ont du mal à se prendre en charge et à subvenir aux besoins de leur famille. Face à une telle situation, ils représentent une proie facile pour des vendeurs d’illusion qui leur promettent monts et merveilles en prétendant changer leur destin comme par un coup de baguette magique. Du genre, un jeune contribue pour 12 000 F à sa formation et à l’issue de celle-ci, une somme de 60 000 F lui est gracieusement rétrocédée pour soutenir son insertion économique.

Quelle est la base légale de cette activité ? Qui sont les réseaux magnanimes qui financeraient cette opération philanthropique au profit de la jeunesse camerounaise, dans un contexte international pourtant marqué par la rareté de l’argent, même pour les agences onusiennes spécialisées dans l’humanitaire mais qui, faute de financements suffisants, ont été obligées de réduire leur voilure ?

En plus, le fourre-tout qui caractérise le contenu des formations proposées par l’Institut MIDA, les insignes religieux sur leur logo et les insignes militaires sur leur journal, ne sont-ils pas des éléments suffisants pour susciter la curiosité et la méfiance des pouvoirs publics ?

A vrai dire, les autorités compétentes auraient dû, plus tôt, ouvrir l’oeil pour voir plus clair dans cette affaire suspecte avant qu’elle ne prenne les proportions que l’on connaît aujourd’hui.

Par ailleurs, si on peut considérer que la pauvreté est un terreau fertile qui permet à de telles pratiques de prospérer, comment comprendre l’engouement suscité même chez les personnes déjà manifestement à l’abri du besoin ? Quoi qu’il en soit, en attendant les résultats de l’enquête en cours, on peut rappeler qu’ici et sous d’autres latitudes, de vastes opérations d’escroquerie ont déjà fait de nombreuses victimes parmi les personnes crédules.

Malgré cela, à chaque fois qu’une opération prétend rapporter gros, avec des bénéfices mirobolants escomptés, ils sont toujours plus nombreux, les compatriotes qui se montrent intéressés sans se poser des questions élémentaires. Alors que les foireuses affaires Famm Cameroun et Leadership Academy devraient inciter à plus de vigilance et de prudence chez les populations.

Dans ces conditions, il revient aux autorités de prendre à temps leurs responsabilités. Elles ne devraient plus attendre parfois plusieurs mois avant d’intervenir alors qu’on voit comment la bulle va finir par exploser.

Rousseau-Joël FOUTE

 

ADS

 

Lire aussi : Aristide Bounah s'insurge contre la démolition des enseignes publicitaires des commerçants

ADS

ADS

Les plus récents

Rechercher un article

ADS

ADS