Cameroun - Cinema. Écrans Noirs : quand les banques exigent des films camerounais rentables

Le Festival Écrans Noirs 2025 ne s’est pas contenté de projecteurs et d’applaudissements. Dans une salle comble, banquiers et responsables culturels ont confronté les cinéastes camerounais à une dure réalité : la passion ne suffit pas pour décrocher des financements.
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La Société Commerciale de Banque Cameroun (SCB), filiale du groupe marocain Attijariwafa Bank, a rappelé qu’un film ne peut être considéré par les prêteurs qu’à condition d’être présenté comme une véritable entreprise.
« Ce que nous attendons, ce sont des projets financièrement viables, avec des échéanciers de remboursement et des délais de rentabilité », a déclaré un représentant de la SCB lors d’un panel présidé par le directeur du festival, Bassek Ba Kobhio.
Un exemple a frappé les esprits : un budget de film de 300 millions FCFA (près de 480 000 dollars). Dans ce cas, les producteurs doivent soumettre un plan d’affaires détaillé, précisant les sources de revenus, le calendrier de récupération des investissements et les modalités de remboursement.
Un secteur sans fonds national
Au Cameroun, il n’existe toujours pas de fonds national dédié au cinéma. Le ministère des Arts et de la Culture ne propose que des dispositifs limités. Résultat : la majorité des réalisateurs dépendent de subventions étrangères ou de leurs économies personnelles. Les banques, elles, restent prudentes, évoquant les risques de piraterie, l’absence de garanties et la faiblesse de la traçabilité des revenus.
Cette prudence maintient l’industrie sous-capitalisée, alors même que des voisins comme le Nigeria ont réussi à transformer leur cinéma en une machine économique estimée à 6 milliards de dollars, selon PwC. Nollywood a su attirer capitaux privés et appuis publics, une leçon que Yaoundé peine encore à intégrer.
Vers de nouvelles solutions africaines
À l’échelle continentale, le vent du changement souffle. La Banque Africaine d’Import-Export (Afreximbank) a lancé en juin dernier le programme Creative Africa Nexus (CANEX), une facilité de 1 milliard de dollars pour financer l’industrie culturelle. Objectif : réduire les risques et inciter les banques commerciales à s’engager davantage dans le secteur.
La clé : professionnalisation
Pour les cinéastes camerounais, l’accès au crédit passera par plus de rigueur : enregistrement des droits de propriété intellectuelle, accords de distribution solides, états financiers audités. Certaines banques, conscientes du potentiel du secteur, forment déjà leurs équipes pour mieux évaluer les risques spécifiques aux projets audiovisuels.
« Écrans Noirs agit comme un pont entre créateurs et financiers. Le dialogue entre les deux secteurs est nécessaire pour que le cinéma soit financé comme n’importe quelle autre industrie », a conclu Bassek Ba Kobhio.
Écrans Noirs: Banks demand profitability from Cameroonian filmmakers
At the Écrans Noirs Film Festival in Yaoundé, bankers and cultural leaders challenged filmmakers to turn passion into viable business projects. The Commercial Bank of Cameroon (SCB), a subsidiary of Morocco’s Attijariwafa Bank, reminded the industry that creativity alone cannot secure credit.
“Banks expect financially sound projects, with repayment schedules and profitability timelines,” an SCB representative told the audience in a panel led by festival director Bassek Ba Kobhio.
Without a national film fund, most Cameroonian producers rely on foreign grants or personal savings, while banks cite piracy risks and poor revenue tracking as barriers. Meanwhile, Nigeria’s Nollywood has become a $6 billion industry by blending private capital and state initiatives.
On a continental level, Afreximbank’s Creative Africa Nexus (CANEX) initiative is pledging $1 billion in loans, equity, and guarantees to de-risk cultural projects and boost commercial financing.
For Cameroonian cinema, the road to credit lies in professionalization: intellectual property registration, distribution contracts, and audited financial statements. As Bassek Ba Kobhio put it, “Écrans Noirs is a bridge between creators and financiers. Dialogue is the only way to treat cinema like any other industry.”
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Viviane GEMELE
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