Cameroun - Energie. Que se passe-t-il à Aes

Théodore Tchopa | Le Jour Mardi le 04 Juin 2013 Société Imprimer Envoyer cet article à Nous suivre sur facebook Nous suivre sur twitter Revoir un Programme TV Grille des Programmes TV Où Vendre Où Danser Où Dormir au Cameroun
Des signes d’un abandon des investissements d’Aes Corporation au Cameroun se sont dessinés à la faveur d’un message du président du groupe américain.

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 Des salariés craignent pour l’avenir, tandis que la direction générale rassure. Les deux corridors d’accès à la direction régionale Aes Sonel Littoral et Sud-Ouest, au quartier Koumassi à Douala, sont séparés par une guérite. Ce mercredi, cinq visiteurs sont assis sur deux bancs d’attente disposés à la façade principale de l’édifice à trois étages. Une grande plaque aux couleurs de la société de production, de transport et de distribution de l’électricité, leur souhaite la bienvenue au « campus de Koumassi». Les visiteurs se font enregistrer et identifier dans les deux guérites qui encadrent le corridor d’entrée du personnel. Un vigile en combinaison noire est debout devant l’une des guérites, tandis que son collègue filtre le passage des voitures au troisième poste d’accueil, à l’autre corridor, sous la vigilance d’autres agents de sécurité en uniforme blanc noir avec une chasuble vert citron.

Une Prado entre, puis une Mitsubishi 4X4. Les employés vaquent à leurs occupations comme d’habitude. Sur leur visage, une apparente sérénité. Difficile pour le premier venu de se rendre compte qu’un vent de chamboulement souffle dans cette « grosse » entreprise depuis lundi. Ce jour-là, des médias camerounais, relayant des informations contenues dans la dernière livraison de l’hebdomadaire panafricain Jeune Afrique, (édition n°2733 du 26 mai au 1er juin 2013), ont annoncé que le groupe américain Aes Corporation met en vente ses parts dans le capital social de la société nationale d’électricité. Sauf qu’il ne s’agit pas des 51% convenus lors de la signature de la convention de concession en 2001, mais de 56%. De quoi inquiéter et susciter des interrogations.

«Aes annonce 56% alors qu’elle n’a en réalité que 51%, les 5% revenant au personnel. Aes devrait rétrocéder ces 5% au personnel deux ans après la mise en concession, conformément aux clauses», se plaint un agent. La majorité des salariés a appris la mise en vente au même moment que les autres Camerounais, soit par le truchement de J.A., soit à travers des mails envoyés ou transférés par d’autres collègues. Ils affichent des attitudes assez mitigées. D’une part, les anciens de la société ont des raisons de s’inquiéter des lendemains incertains pour avoir vécu la première privatisation « qui était brutale ». D’autre part, certains nouveaux, « qui ne savent pas de quoi il retourne », pensent que ce pourrait être l’occasion rêvée de faire de bonnes affaires. Ils fondent leur espoir sur ce qui est arrivé avec les deux sociétés de téléphonie mobile opérant au Cameroun. Une partie du personnel de ces sociétés a été vendue à une autre société qui a gagné le marché de construction des pylônes, non sans répercussions significatives sur les salaires. « Des transactions similaires pourraient profiter à des agents d’Aes Sonel en cas de reprise », reconnait un cadre.

Sentiment tout aussi mitigé face à la mesure du groupe d’Arlington de quitter le Cameroun. Pour certains, c’est une initiative salvatrice, une décision louable. «Il faut qu’ils s’en aillent, parce qu’ils n’ont pas réalisé grand-chose ces douze dernières années. Partout, les poteaux continuent de tomber, les infrastructures sont dans un état de délabrement inquiétant et ils ne veulent pas investir de l’argent alors qu’ils sont déjà rentrés dans leurs investissements », jubile un employé, qui redoute la reprise par des étrangers, «qui feront la même chose», et souhaite que l’Etat rachète les 56% et donc reprenne en main cette société «stratégique». Il espère également que le nouveau repreneur rappellera les primes de productivité promis au personnel mais qui n’ont pas été payées. D’autres agents trouvent normal que le groupe américain, à huit ans de la fin de la concession de 20 ans négociée avec l’Etat camerounais, se retire une fois qu’il a récupéré l’argent investi. «Je ne suis pas pour que l’Etat reprenne, mais pour qu’on revende les 51% aux nationaux car je sais qu’il y en a parmi nos opérateurs économiques qui peuvent racheter», affirme un cadre technique.

Des signes qui ne trompent pas

Des signes se profilaient à l’horizon pour autant. Le 16 mai en effet, le président du groupe Aes Corporation, Andy Vesey, a adressé aux personnels du groupe un «bien curieux» message rappelant la réorganisation des cinq Strategic Business Unit (SBU) du groupe. «Quand on lit l’organisation d’EMEA dont fait partie l’Afrique, on constate qu’il est créé un directeur financier, sauf l’Afrique. De deux, on nomme un responsable des services généraux en précisant ‘‘sauf l’Afrique’’». C’est en relisant donc ce message, que l’article de J.A. a du reste remis au goût du jour, que les employés ont compris que le départ d’Aes du Cameroun se concoctait depuis.

Contacté mercredi, un responsable à la direction générale d’Aes Sonel a refusé d’aborder le sujet, indiquant que « pour l’heure il n’y a aucune information officielle sur ce départ. C’est de la pure spéculation. Quand viendra le moment, officiellement on vous informera ». Mardi 28 mai en revanche, au lendemain de la diffusion de l’information, le directeur général, Jean David Bilé a adressé à l’ensemble du personnel un « mail d’apaisement » dans lequel il leur demande de se mettre au travail et de poursuivre leurs activités en toute sérénité patriotisme oblige, même si la mise en vente venait à se confirmer. « Il nous a dit que la direction générale est en contact permanent avec le siège et qu’ils nous en tiendront informés minute by minute s’il y a changement», nous ont confié, au moins deux cadres approchés. Pour l’heure, la sérénité apparente observée au sein de l’entreprise voile l’état d’esprit réel des employés de cette société.

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